Les déesses-mères gauloises (voir la page complémentaire sur les Vénus gauloises) (voir la page sur la religion)

Musée de St Germain-en-Laye

- Une déesse-mère allaitant un enfant déjà âgé

- Deux déesses-mères de facture traditionnelle avec la moitié du moule de fabrication (voir la technique plus bas)

A remarquer les trois coiffures différentes (le chignon étant très fréquent).

Le culte des déesses-mères existe depuis l'époque néolithique et est profondément ancré dans la mentalité gauloise. Ces divinités sont connues par de nombreuses inscriptions en Gaule et en Bretagne (Grande-Bretagne). Groupées le plus souvent  par trois*, elles sont invoquées collectivement et apparaissent comme des génies protecteurs, plus particulièrement des femmes.
Le monument de Mannheim  (ci-contre) montre ces trois déesses assises sur une banquette à dossier, drapées dans de vastes manteaux et tenant sur leurs genoux des corbeilles de fruits. Celle du milieu est nue tête, les deux autres sont coiffées de turbans imposants.

* La triade des déesses-mères est fréquente chez les indo-européens, à l'époque chrétienne la triade deviendra celle des "trois Maries" et nulle doute que  le culte de la Vierge Marie chez les catholiques est une survivance du cule de la déesse-mère.

Ces trois déesses-mères dans une coquille ont été trouvées à Lyon, elles portent chacune une corne d'abondance (Musée des Beaux-Arts au Palais Saint-Pierre)

Appelées Matrae, Matres ou Matronae après la conquête romaine, les déesses-mères sont très populaires et honorées dans toute la Gaule. Elles symbolisent les divinités féminines de la famille, protectrices des enfants, de la maternité (fécondité) et de l'abondance (déesses nourricières). Quand elles représentent la maternité, elles sont toujours figurées assises dans un fauteuil d'osier tressé tenant sur les genoux un ou deux enfants qu'elles allaitent ou non. Elles portent une tunique serrée à la taille et un manteau. Quand elles représentent l'abondance, elles portent une corbeille de fruits sur les genoux (voir Alésia) ou une corne d'abondance sur le bras (voir Argentomagus 4) ou bien une patère (voir Arles). A l'époque gallo-romaine elles sont souvent représentées seules. Ces statuettes en terre cuite étaient déposées sur les autels domestiques, dans les sanctuaires des sources** ou dans les sépultures*** (voir plus bas). Les déesses-mères ont été parfois assimilées à Vénus, Epona, Minerve, Cybèle, Cérès.

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Les déesses-mères sont aussi des divinités des eaux, des sources et des fontaines guérisseuses. Beaucoup de fontaines consacrées aux Matrae ont été christianisées sous le nom de Sainte Marthe ou de Sainte Marguerite.

*** Devant cette diversité de sujets, on peut se demander à quoi servaient les terres cuites gallo-romaines. On a retrouvé des terres cuites de même type dans les tombes, dans les sources, dans les puits, dans les temples, dans les maisons ; certaines terres cuites pouvaient servir à l'amusement des enfants, ou d'ex-voto, ou de dépôt funéraire. Nous sommes encore trop à court d'observations très précises en Gaule pour pouvoir donner des règles générales, et il faut considérer chaque découverte avec beaucoup de soin et de sens critique. Hugues VERTET : "Les statuettes de terre cuite gallo-romaines "


L'INDUSTRIE DES TERRES CUITES : moule et statuette de déesse-mère

Les figurines gallo-romaines furent les dernières terres cuites de l'Antiquité. Leur centre de fabrication était localisé le long de la vallée de l'Allier (Toulon-sur-Allier, Lezoux), dans des ateliers qui produisaient simultanément des poteries sigillées. La technique du moulage permettait une large diffusion dans les provinces de la Gaule : des statuettes de déesses-mères, tirées d'un même moule de Toulon-sur-Allier, ont été retrouvées à Amiens, dans le Finistère, le Puy-de-Dôme, la forêt de Compiègne.
Les artisans modelaient à la main, sur des modèles massifs de bronze ou d'argile, des moules en creux, qu'ils séparaient généralement en deux parties, avec une lame, suivant une ligne déterminée. Ils obtenaient alors deux éléments distincts de moules, l'un pour le devant (à droite sur la photo) l'autre pour le dos (à gauche). Quand ceux-ci étaient cuits, ils les remplissaient avec l'argile blanche qui en épousait toutes les formes. L'argile, une fois sèche, se détachait facilement des moules : l'artisan collait alors les deux parties ainsi obtenues à l'aide d'une pâte claire, la barbotine. Puis il faisait cuire la figurine à feu très doux, après avoir pratiqué un ou deux trous d'évent pour en éviter la déformation.
Voir un complément sur la fabrication en bas de page
Voir aussi la fabrication comparable des Vénus

Cette déesse-mère (photo ci-contre), trouvée à Toulon-sur-Allier, est assise dans le haut fauteuil gallo-romain en osier tressé et à dossier arrondi. Elle soutient de chaque main un enfant emmailloté, qu'elle allaite. Sa robe descend en longs plis jusqu'aux pieds. Ses cheveux, dont les boucles stylisées en S apparaissent nettement sur les deux moules, sont relevés en bandeau. Elle est figurée dans une position rigoureusement frontale.
Texte extrait de la Documentation photographique "La Gaule romaine" (01/1966)

Symboles de maternité et de force créatrice, les déesses-mères exerçaient une action tutélaire : on plaçait leur image dans les laraires, dans les sanctuaires de sources, avec des ex-voto représentant les parties du corps malades, ou dans les sépultures.
 

Reconstitution de la sépulture d'un nouveau-né avec déesse-mère, cheval et Vénus qui exercent une action protectrice sur le mort dans l'au-delà (Argentomagus).

 

Argentomagus 1 Argentomagus 2 Argentomagus 3 Argentomagus 4 Argentomagus 5
2 : déesse-mère allaitant deux enfants provenant de la tombe d'un nouveau-né (tombe ci-dessus).
4 : déesse-mère avec corne d'abondance et patère. Cette statuette (H : 42 cm) diffère des autres dans le sens où elle est en pierre calcaire, elle a été trouvée près du temple
5 : déesse-mère nue protégeant avec son manteau ses cinq enfants d'âge différent (détail de deux des enfants à droite). La nudité et le fait qu'elle soit debout la rapprochent des Vénus.

Orléans
(prov : Tigy, Loiret)
Tours Bourges (prov Vierzon) Vannes Compiègne (découverte à Rome en 1783)
Alésia Alésia Alésia (avec corbeille) Arles (avec patère)
Musée Carnavalet.
Provenance : Paris 31 rue Descartes en 1897.

Tête avec son moule, côté face.

 

Musée Carnavalet. Musée Carnavalet. Musée Carnavalet.  
Périgueux 1 Périgueux 2 Vaison la Romaine 1 Vaison la Romaine 1 (signé Pistillus)
Description des déesses-mères par Hugues VERTET : "Les statuettes de terre cuite gallo-romaines "

"Vêtue d'une longue robe, assise dans un fauteuil d'osier tressé à haut dossier, elle allaite tantôt un, tantôt deux bébés, et sous cette dernière forme, paraît être une production plus fréquente en Gaule qu'en Italie ou dans les autres provinces de l'Empire. Entre les mains des céramistes locaux, elle devient, peu à peu, rigide, figée dans une frontalité austère et impassible. Sa tête devient très grosse. Ses cheveux se stylisent en S. En même temps, l'enfant s'amenuise ; enfermé dans son maillot, minuscule objet dans la main de la déesse, analogue aux nourrissons étagés sur les bras des déesses-mères de Capoue. La mère grandit sans mesure, tandis que l'enfant diminue. On pourrait remarquer une évolution de même sorte dans les représentations mariales mille ans plus tard : l'enfant, d'abord essentiel, est assis en frontalité sur les vierges romanes ; mais à mesure que le culte de sa mère se précise et s'organise, il se tourne lui aussi vers elle, glisse sur le côté, diminue de taille, s'esquive même parfois; il n'est plus qu'un attribut charmant. Sur les terres cuites de la Gaule, le soin apporté à la figure de la déesse et la négligence de l'enfant, qui disparaît parfois sur certaines statuettes des fabriques de l'Ouest, témoignent d'une évolution artistique curieusement analogue".

Amiens 1 Amiens 2 et 3 Amiens 4 Amiens 4

Amiens 1 :  III° ap JC Provenance : rue des trois cailloux.
Amiens 4 : début III° ap JC. Provenance :  Ribemont sur Ancre (Somme), trouvée face contre terre à la base du remblai fermant le bouchon d'un puits. Sa fonction était de protéger le puits et d'y attirer l'eau.

 Musée d'Aquitaine Bordeaux 1 Musée d'Aquitaine Bordeaux 2 Musée d'Aquitaine Bordeaux 3 Musée d'Aquitaine Bordeaux 4

Voir les déesses-mères de Burdigala 

Voir les déesses-mères d'Argentomagus 

Voir les déesses-mères de St Germain-en-Laye  

Voir les déesses-mères d'Avaricum

Voir la page complémentaire sur les Vénus gauloises

Voir la page sur la religion

Martigny (Suisse) Montbouy Landevennec

 

La fabrication selon Hugues VERTET : "Les statuettes de terre cuite gallo-romaines "

"Les fabricants de statuettes ont, dès le début, semble-t-il, adopté la technique du moulage. On a trouvé des matrices en argiles pleine, de pigeons ou de quadrupèdes par exemple, modelées à la main, finies à l'ébauchoir. L'artisan entourait l'objet d'une chape de glaise, puis la séparait en deux parties avec une lame qui suivait une ligne tracée profondément sur un parcours déterminé, de telle façon que les deux creux obtenus fussent de dépouille. On a rarement trouvé des statuettes dont la fabrication ait fait appel à des moules très nombreux. La simplicité et la rapidité déterminaient le travail. On ne retrouve pour ainsi dire jamais en Gaule la fantaisie qui inspire les céramistes de Tanagra ou de Myrina par exemple, dans l'assemblage varié des membres, des attributs ou des attitudes.

Les potiers inscrivaient souvent leur nom au dos des moules, dans l'argile encore molle. On a pu retrouver ainsi toute une série de noms autochtones, quelquefois très peu romanisés, comme "Oppo", "Sacrillos", "Abudinos"... (fig. 1 et 2). Parfois le nom est accompagné de la formule - "avot" où l'on voit le synonyme gaulois de "fecit", ci que l'on retrouve aussi sur quelques moules de vases sigillés contemporains. Il ne semble point, comme on l'a supposé, que l'on puisse voir là un certain orgueil de propriété artistique, car des noms différents se retrouvent sur des moules identiques. Les céramologues pensent plutôt que ce sont des marques de propriété ou des signes permettant de compter plus facilement le travail accompli par un ouvrier.

Lorsque le moule était cuit, il suffisait à un manœuvre de pousser, avec les doigts, de l'argile dans le moule, en couches minces superposées qui en épousaient ainsi les cavités mêmes minimes, et de laisser sécher ce revêtement intérieur; il se détachait de lui-même par le retrait de la dessication. Les parties du sujet étaient alors collées avec une barbotine fluide. Les pattes raides des chevaux, moulées à part, étaient ajustées au corps et l'ensemble à une petite plaquette. Les Vénus formées de la face et du dos étaient collées, souvent sans beaucoup de soin, sur un socle hémisphérique tiré lui aussi d'un moule. Un trou d'évent percé avec une pointe assurait que la dilatation des gaz renfermés à l'intérieur ne ferait pas éclater l'ensemble sous la chaleur de la cuisson.

Une des caractéristiques de cette production gauloise semble être que le dos de la figure était aussi soigné que le devant, et que la terre, la plupart du temps très blanche, a très rarement gardé quelques traces de peinture".


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