L'importance de l'écriture
L'écriture égyptienne est l'une des premières écritures de l'humanité (dès
la fin du IVème millénaire av JC),
elle a eu une importance considérable et permis le développement de la
première grande civilisation. Toutefois, peu d'Egyptiens (sans doute moins
de 1%) savaient lire et écrire, seule une élite avait accès à l'écriture.
L'écriture a une fonction utilitaire et politique : sans l'écrit, il
aurait été impossible au pharaon d'imposer son autorité sur un pays aussi
étendu du Nord au Sud. En raison de la crue du Nil, chaque année les limites
des terres étaient effacées. L'établissement d'un cadastre (impossible sans
l'écrit) était donc fondamental pour enregistrer les parcelles et calculer
l'impôt. Très tôt, nous avons trace des recensements systématiques des biens
et des personnes. C'est encore l'écrit qui donnait force de loi aux décrets
royaux gravés sur des stèles, les palais et les temples. Avec l'écriture, le
pharaon disposait d'un outil efficace pour exercer sa propagande.
Mais pour l'Egyptien, l'écrit est bien plus que l'enregistrement des lois,
des événements, des biens et des hommes, elle a une fonction religieuse
et magique pour garder en mémoire les actes essentiels des souverains
destinés à assurer la
Maât : victoire sur les ennemis, célébrations de rites religieux et
royaux, fondations d'édifices. De même, l'écriture servait à rédiger les
formules magiques qui aidaient le mort à triompher des périls qu'il
rencontrait dans sa marche vers la renaissance.
L'invention de l'écriture était considérée comme un cadeau des dieux et plus
précisément celui du dieu
Thot, maître du
calendrier, de la science, de l'écriture et des scribes. Les Egyptiens
appelaient d'ailleurs leur écriture "médou-nétjer" ("paroles divines"), ce
qui se rapproche du mot grec "hiéroglyphes"
(caractères sacrés). Avant d'écrire, les scribes récitaient toujours une
prière adressée à Thot.
Les différents types d'écriture :
- Les hiéroglyphes : écriture réservée aux monuments, ils
étaient utilisés pour tout ce qui devait être établi pour l'éternité. Ils
concernaient donc des textes religieux, des inscriptions historiques et
politiques.
- Le
hiératique : une simplification des hiéroglyphes transcrite en
écriture cursive (courante). On l'utilisait pour les textes qui n'étaient
pas destinés à être éternels.
- Le
démotique : Vers le VIIème siècle av JC, l'écriture fut
encore simplifiée et abrégée, le démotique ("écriture populaire") remplace
le hiératique (ce dernier reste cependant en usage pour les textes
religieux).
Les hiéroglyphes :
Ecrire en hiéroglyphes
est compliqué car le système utilise beaucoup de signes qu'il faut retenir
(environ 5000).
De plus, le même hiéroglyphe peut être utilisé selon deux techniques
totalement différentes.
Exemple : le signe qui représente une bouche (
)
peut :
- soit être lu en temps qu'idéogramme (ou pictogramme), c'est-à-dire qu'il
signifie ce qui est dessiné : une bouche
- soit être lu en temps que phonogramme, c'est-à-dire qu'il indique le son
du mot, ici le son "r" (technique du rébus).
Pour compliquer les choses, l'écriture peut être écrite dans des sens
différents : elle
se lit de droite à gauche, de gauche à droite, verticalement (colonnes) ou
horizontalement (lignes).
Le sens de
la lecture se fait dans la direction vers laquelle les signes sont orientés,
autrement dit il convient de déterminer de quel côté les signent
« regardent » et aller à leur rencontre. Ex :
(la lecture se fait ici de gauche à
droite).
Pour terminer, l'écriture n'utilise que des consonnes, il n'y a pas de
voyelles.
Au XIXème siècle, quand on s'est passionné pour l'Egypte antique, personne
n'était plus capable de lire les hiéroglyphes. C'est un Français :
CHAMPOLLION, qui a percé les secrets de cette écriture.
En savoir plus sur les
hiéroglyphes
Manipuler les hiéroglyphes
En
savoir plus sur Champollion
Les scribes
Les scribes, compte tenu
de l'importance de l'écriture, occupaient une place de choix dans
l'administration du pays. Ils faisaient partie des 5 % de la population
active (1% de la population totale) qui savaient lire et compter, ils étaient conscients du pouvoir que
leur conférait leur savoir et "la Satire des métiers " les glorifie non sans
raison. Un père parle à son fils :
Lecture :
Sois
scribe !
Cela te sauvera des taxes et te protégera de tous les travaux. Cela
t’épargnera de porter la houe et la pioche, de sorte que tu n’auras pas à
transporter le panier. Cela t’évitera de manier la rame et t’épargnera des
tourments, n’étant pas sous la coupe de nombreux maîtres ou sous la coupe de
plusieurs chefs.
Quant à tous ceux qui exercent un
métier, le
scribe en
est le premier. C’est le
scribe qui
établit la taxation de la Haute et de la Basse Égypte ; c’est lui qui reçoit
d’eux (les montants dus) ; c’est lui qui tient le compte de tout. Tous les
soldats sont dépendants [de lui]. C’est lui qui conduit les fonctionnaires en
présence (du roi), plaçant chacun à ses pieds. C’est lui qui commande au pays
tout entier, toutes activités étant sous son autorité.
(La Satire des métiers).
Voir la page sur la
Satire des métiers |
Les scribes étaient des
fonctionnaires, ils étaient recrutés et payés par l'Etat.
Ils intervenaient à tous les niveaux de la société : du contrôleur des
équipes de moissonneurs (voir
la tombe de Menna) au bureaucrate de l'administration centrale du
palais. Les scribes pouvaient
exercer aussi des charges cléricales et militaires. Ainsi, les scribes assumaient,
par délégation du roi, le pouvoir dans tous les domaines : économiques,
politiques, militaires et religieux. La grande majorité de la population
étant analphabète, ils exerçaient aussi le métier d'écrivain public.
Le monde des scribes était fortement hiérarchisé,
tous obéissaient au scribe suprême : le
vizir
(sorte de premier ministre).
La formation du jeune scribe commençait vers 5 ou 6 ans, il fallait une
dizaine d'années pour apprendre à lire et écrire les hiéroglyphes.
En savoir plus sur les
scribes (notamment sur son matériel).
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Le musée du Louvre
possède une statue de scribe exceptionnelle. Malgré la dénomination de
"scribe accroupi", l'homme est assis en tailleur dans la position
traditionnelle du lotus, la jambe droite croisée devant la gauche, son
rouleau de papyrus ouvert, tenu dans la main gauche. La main droite
tenait le calame, aujourd'hui disparu. Le regard est d'une intensité et
d'un réalisme saisissants, il reflète la clairvoyance du haut
fonctionnaire.
La peau est peinte en ocre rouge, la couleur des hommes (les femmes sont
peintes en ocre jaune), les cheveux courts sont noirs, couleur de la terre
fertile d’Egypte.
Les bourrelets du ventre attestent la position sociale du scribe bien
nourri.
En savoir plus sur ce scribe célèbre. (Milieu du IIIème millénaire av
JC). |
Le papyrus |
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La
récolte du papyrus - Mastaba de Néfer et Kahay - Saqqarah - Vers 2450 av
JC |
Le
papyrus est une plante qui peut atteindre 3 à 6 m de hauteur, elle
poussait en abondance dans les marais de la Basse-Egypte. Aujourd'hui,
le papyrus ne pousse plus à l'état naturel sur les bords du Nil. Les
Egyptiens ont très vite (vers 3000 ans av JC) utilisé cette plante pour
fabriquer un support solide de l'écriture ("papyrus" donnera le mot
"papier"). |
Photo de papyrus
aujourd'hui au bord du Nil (Louxor) |
Pour obtenir les rouleaux de papyrus :
- on tronçonne les tiges de papyrus en morceaux (à la hauteur prévue
pour la page)
- on écorce les tiges coupées pour utiliser la moelle
- on coupe de fines lamelles dans la moelle de la tige du papyrus
- on écrase ces lamelles humidifiées, on les assemble
perpendiculairement et on les bat pour coller les fibres ensemble
- on laisse sécher
- on polit la feuille obtenue avec une pierre ronde
- on colle les feuilles les unes à la suite des autres pour obtenir un
rouleau (le rouleau a une hauteur maximale de 47 cm et peut atteindre 40
m de long).
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Un papyrus moderne,
on voit bien l'entrelacement des lamelles de papyrus.
A gauche, le lotus, symbole de la Haute-Egypte, à droite, le papyrus,
symbole de la Basse-Egypte. Les deux plantes se ressemblent beaucoup. |
Lissoir |
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Avant d'écrire, le scribe égalise le papyrus avec un lissoir. Il
commence à écrire en premier sur la page dont les fibres sont disposées
horizontalement (le recto). Il écrit le texte à l'encre noire, l'encre
rouge est utilisée pour les têtes de chapitres et les notes dans les
marges.
Le scribe écrit de droite à gauche, le rouleau est donc enroulé de
gauche à droite, prêt à être lu.
Toutefois, on n'écrit pas tout sur des papyrus car le coût de
fabrication est trop élevé. Pour des textes courants, on utilise les
ostraca.
Si nous connaissons si bien l'Egypte antique aujourd'hui, c'est grâce à
l'écriture, au papyrus, au climat sec qui a permis de le conserver et à
Champollion. Sans l'incendie de la bibliothèque d'Alexandrie (40 000
rouleaux de papyrus détruits) nous en saurions bien encore davantage.
PS : le mot "papyrus" désigne à la fois la plante et le support fabriqué
(rouleau) pour écrire. |
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Le
papyrus est le symbole de la Basse-Egypte.
Ci-contre, le hiéroglyphe (3 tiges de papyrus) qui désigne le delta (Basse-Egypte).
Les 3 tiges sont disposées sur le signe de l'eau.
Musée du Louvre (Basse Epoque).
Le papyrus (la plante) a une fonction religieuse, il est représenté sur les temples,
porté en procession... il symbolise la renaissance. |
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Autre
exemple du hiéroglyphe (bosquet de papyrus stylisé) qui sert de
déterminatif pour écrire le nom de la Basse-Egypte.
Plaque de faïence siliceuse murale du palais de Séthi Ier à Qantir (XVIIIème
dynastie).
Musée du Louvre |
Le papyrus est utilisé
aussi pour fabriquer des bateaux, des nattes, des sandales, des cordes, des
pagnes. La racine et sa chair pouvaient être consommées.
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