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Vitruve
Extrait de
"L'architecture de Vitruve, traduit en français, avec des remarques, par
De Bioul" 1816.
Les chapitres 6 et-8
dans le livre V du De architectura de Vitruve :
VI. De la forme à donner aux théâtres.
Voici de quelle manière on doit faire le
plan d'un théâtre. Après avoir placé son centre au milieu, il faut
décrire un cercle dont la circonférence soit la grandeur du bas du
théâtre. Dans ce cercle on inscrit quatre triangles équilatéraux dont
les extrémités placées à égale distance, touchent la circonférence :
telle est la marche que, selon le rapport harmonieux des astres, suivent
les astronomes pour la disposition des douze signes célestes. Celui de
ces triangles dont le côté est le plus près de la scène en détermine la
face, à l'endroit où il fait une section dans le cercle, et une autre
ligne, parallèle à celle-là, viendra, en passant par le centre, séparer
l'avant-scène de l'orchestre.
Si nous donnons plus de largeur à la scène qu'elle n'en a chez les
Grecs, c'est parce que tous les acteurs y restent pendant l'action;
l'orchestre est réservé pour les sièges des sénateurs. La hauteur de la
scène ne doit point avoir plus de cinq pieds, afin que ceux qui sont
assis dans l'orchestre puissent voir tout le jeu des acteurs. Les amas
de degrés disposés en forme de coin dans le théâtre doivent être divisés
de manière que les angles des triangles, qui vont toucher la
circonférence du cercle, règlent l'alignement des escaliers qui
encadrent ces amas, jusqu'à la première précinction. Du milieu de ces
amas inférieurs doivent partir d'autres escaliers qui sépareront les
amas supérieurs.
Les angles qui règlent l'alignement des escaliers de la partie
inférieure des degrés seront au nombre de sept; les cinq autres seront
réservés aux différentes parties de la scène; en face de celui du milieu
doit se trouver la porte royale; les deux angles placés à droite et à
gauche indiqueront les portes des étrangers; les deux derniers seront en
face des galeries de retour. Les degrés de l'amphithéâtre sur lesquels
on place les sièges ne doivent pas avoir moins d'un pied et un palme de
hauteur, ni plus d'un pied et six doigts; leur largeur ne doit point
être de plus de deux pieds et demi, ni de moins de deux pieds.
VIII. Des théâtres des Grecs.
Les théâtres des Grecs ne sont point en tout
conformes à ceux des Latins. Dans le cercle tracé sur la terre, les Latins
décrivent quatre triangles; les Grecs, eux, y figurent trois carrés, dont
les douze angles vont toucher la ligne circulaire. Le côté du carré, qui est
le plus près de la scène et qui fait une section dans le cercle, détermine
le devant du proscenium. Une ligne parallèle à ce côté et tracée à
l'extrémité du cercle, constitue le front de la scène. On tire encore une
autre ligne qui, passant par le centre de l'orchestre, suit la direction de
celle du proscenium; les points où coupant à droite et à gauche la
circonférence elle forme deux angles dans chaque hémicycle, deviennent deux
centres. En appuyant la pointe d'un compas au centre droit, on trace une
ligne courbe, de l'intervalle gauche au côté droit du proscenium. En posant
également un compas à l'angle gauche, on trace une autre ligne courbe depuis
l'intervalle droit jusqu'au côté gauche du proscenium.
Ces trois centres, par leur disposition, donnent à l'orchestre des Grecs
plus d'étendue, éloignent la scène et rétrécissent l'avant-scène qu'ils
appellent logeÝon;
de sorte que, chez eux, les acteurs tragiques et les comiques jouent sur la
scène, tandis que les autres se distribuent dans l'orchestre pour remplir
leur rôle. Voilà pourquoi, en grec, les uns sont appelés scéniques, et les
autres thyméléens. La hauteur de cette avant-scène ne doit point être de
moins de dix pieds ni de plus de douze. Les escaliers qui séparent les amas
de degrés, seront alignés au droit des angles des carrés, jusqu'au premier
palier; du milieu de ces amas de degrés, on dirigera les escaliers de ceux
qui seront au-dessus de ce palier; et plus les paliers se multiplieront,
plus les amas de degrés iront en s'élargissant.
Après être entré dans ces détails avec soin et exactitude, nous devons
maintenant porter toute notre attention sur le choix à faire d'un lieu où la
voix puisse régulièrement se développer, sans que rien la repousse, la
heurte et l'empêche d'apporter à l'oreille les paroles bien accentuées. Et
il est quelques lieux qui s'opposent naturellement aux sons de la voix :
tels sont les dissonants, que les Grecs appellent kathxoèntew;
les circonsonnants, qu'ils nomment
perihxoèntew; les résonnants, qu'il
appellent Žnthxoèntew;
les consonnants, qu'ils nomment
sunhxoèntew. Les lieux dissonants sont
ceux dans lesquels la première partie de la voix, venant à rencontrer, en
s'élevant, des corps solides qui la repoussent, étouffe en retombant l'autre
qui la suit.
Les circonsonnants sont ceux dans lesquels la voix, gênée dans son
développement, se brise en chemin, sans arriver à toute son extension, et
s'éteint en ne faisant entendre que des paroles inarticulées. Les résonnants
sont ceux dans lesquels la voix, répercutée par un corps solide, rebondit en
quelque sorte, et, reproduisant son image, répète les derniers sons à
l'oreille. Mais les consonnants sont ceux qui, venant tout d'abord en aide à
la voix, l'augmentent à mesure qu'elle monte, et la conduisent jusqu'à
l'oreille, claire et distincte. Si donc dans le choix des lieux on apporte
une scrupuleuse attention, la voix, ménagée avec prudence, produira dans les
théâtres les meilleurs effets.
La disposition du plan des théâtres présentera des caractères qui les feront
distinguer entre eux; ceux qui seront dessinés avec des carrés
appartiendront aux Grecs; ceux qui le seront avec des triangles équilatéraux
seront pour les Latins. Celui qui voudra suivre ces préceptes ne laissera
rien à désirer dans l'ordonnance des théâtres.
Remarques
d'après De Bioul sur la différence entre les théâtres grecs et romains :
D'après les règles posées par Aristote dans sa Poétique, et d'après l'exemple
des meilleurs poètes grecs, la scène se passe toujours dans un lieu public ; or,
il n'est ni vraisemblable, ni possible, dit de Bioul, que cette action se passe
en public sans qu'il y ait beaucoup de gens, autres que les acteurs, qui y
soient intéressés, et dont la fortune dépende de celle des premiers personnages.
Aussi toutes les tragédies des poètes grecs sont-elles toujours accompagnées
d'un choeur composé de différents ordres : de citoyens, soit de prêtres, soit de
vierges, soit d'enfants, etc. ; ils étaient censés être le public, présent et
intéressé à l'action. C'était au chœur que les acteurs s'adressaient, lorsqu'ils
paraissaient interroger le public; c'était le choeur qui leur répondait, qui,
placé dans l'orchestre depuis le commencement de la pièce jusqu'à la fin, au
milieu des spectateurs, ne faisait, pour ainsi dire qu'un avec eux. Le choeur
s'identifiait tellement avec la pièce, que sans lui il n'y aurait plus eu de
tragédie. Sa principale fonction était de marquer par ses chants les intervalles
des actes, pendant l'absence des acteurs que la nécessité de l'action avait fait
sortir de la scène.
Les personnages qui composaient ce choeur, si nécessaire aux drames des anciens,
étaient très nombreux. Il n'y avait que les acteurs principaux qui paraissaient
sur la scène.
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