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(« hellène » = « grec » en langue grecque)
I/ DES VOISINS GRECS
Dès le VII° siècle avant J.C., des colons grecs sont venus
s’installer en Sicile et dans le sud de la botte italienne, c’est-à-dire en
Grande Grèce. Ainsi les Romains ont-ils été très tôt confrontés à la langue des
Grecs et à leur civilisation raffinée et brillante. La capitale de la Sicile,
Syracuse, était célèbre pour ses temples mais aussi pour un mode de vie qui
faisait l’émerveillement des Romains. De plus la Sicile était très riche sur le
plan agricole. Cela explique qu’elle devint un enjeu dans la lutte entre les
Carthaginois et les Romains lors de la première guerre punique. De plus sa
situation géographique la place entre ces deux puissances. Quand les Romains
conquirent la Gaule, ils rencontrèrent là encore des Grecs : ceux-ci avaient
installé des comptoirs sur les côtes et avaient fondé des villes : Massalia,
Nice, Agde etc…
II/ L’INFLUENCE
GRECQUE
L’influence de la culture grecque
s’est étendue jusqu’à Naples (du grec nea – polis, la ville nouvelle) en
Campanie, où l’on continua longtemps à parler grec (tout comme dans le sud de la
Gaule, à Massalia par exemple, où le grec perdura longtemps).
1/ La
langue
La confrontation avec les Grecs d’Italie et de
Sicile rendit leur culture familière aux Romains. C’est pourquoi lorsqu’au II°
siècle avant J.C. ils conquirent la Grèce et en firent une province romaine, ils
se montrèrent admiratifs de la culture du vaincu et ne lui imposèrent pas leur
langue. C’est même le contraire qui arriva : les Romains apprirent le grec.
Toute la partie est de l’empire continua à parler grec. Dans l’antiquité, le
grec est la langue de la culture, tandis que le latin est la langue de
l’administration. Pendant des siècles tout Romain cultivé était bilingue, dès
son plus jeune âge : il était capable de lire et d’écrire aussi bien en grec
qu’en latin. En effet, souvent, il avait eu une nourrice puis un pédagogue
grecs. On dit que même Caton l’Ancien (234 à 149 avant J.C.) qui, comme les
conservateurs de son époque, jugeait les Grecs trop décadents et pas assez
vertueux et qui s’était opposé à l’introduction à Rome de la culture grecque, se
résolut à apprendre le grec à plus de 80 ans.
Cf Horace : « Graecia capta ferocem victorem cepit,
et artes
Intulit agresti Latio »
Epîtres II, 1, v. 156/157
(La Grèce vaincue
s’empara de son farouche vainqueur et fit pénétrer les arts dans l’agreste
Latium »)
2/ La vie quotidienne
Confrontés
au mode de vie grec, les Romains s’en inspirent. Ainsi non seulement ils
décorent leur maison à l’aide d’œuvres grecques ou de copies, mais encore c’est
le plan de la maison lui-même qui subit l’influence grecque : au plan original
de la domus, les architectes ajoutent une partie plus moderne, centrée
autour du péristyle (dont le nom grec montre clairement l’origine). Certains
Romains, par snobisme, se piquent de vivre à la grecque, comme nous le montre le
texte suivant de Varron, tiré de Rerum rusticarum (1er siècle
avant J.C. :
« Ils pensent ne point avoir une villa, s’ils
n’usent pas d’une foule de mots grecs pour se l’approprier, en appelant ses
différentes pièces : prokoïtôna (antichambre), palaïstran (palestre),
apodutèrion (vestiaire), péristulon (péristyle), ornithôna (volière),
péristéréôna (pigeonnier), opôrothèkèn (resserre à fruits). »
Sur le forum aussi, on voit apparaître des
basiliques, entourées de colonnades.
D’autre part, les Romains adoptent les habitudes
des Grecs en matière de soins du corps et d’exercice physique, en particulier
dans les thermes qui, la plupart du temps, comportent un gymnase et une
palestre.
3/ La religion
Sous
l’influence de la pensée et de la mythologie grecques, la religion romaine
primitive se transforme en profondeur. Aux puissances indéterminées (numina)
et aux dieux représentant les forces de la nature se sont substitués des dieux
figurés sous l’apparence d’hommes et de femmes (anthropomorphisme). Les dieux
romains sont identifiés avec les dieux grecs ayant les mêmes domaines d’action ;
ils prennent les attributs, les symboles et les mythes de leurs équivalents
grecs. Par exemple, Jupiter est assimilé à Zeus. Les mythes de la religion
grecque apporte du pittoresque à la religion romaine. Mais la croyance en des
puissances non figurées demeure vivace.
4/ Les
arts et la pensée
A l’origine, les Romains s’intéressaient peu à la
culture et aux arts. Leur civilisation est avant tout une civilisation de
soldats et de laboureurs ; ce sont des ingénieurs et des constructeurs
remarquables, mais ils sont peu intéressés par la réflexion philosophique. C’est
pourquoi ils se sont d’abord montrés méfiants envers un peuple qui honore le
théâtre autant que la politique, l’athlète autant que le soldat, le philosophe
autant que le paysan. Ils considéraient les Grecs comme des gens peu sérieux
(des « Graeculi » : des « petits Grecs »), plus portés sur le discours
que sur l’action.
Cependant, ils étaient conscients de l’antériorité
de la culture grecque et, paradoxalement, l’admiraient beaucoup. C’est pourquoi
les jeunes gens des familles aisées allaient achever leurs études à Athènes, en
Asie Mineure ou en Grande Grèce pour apprendre la rhétorique et la philosophie
et ainsi se préparer à leur futur métier d’orateur et d’homme politique. C’est
également la raison pour laquelle ils ont accueilli assez tôt, dès le II° siècle
avant J.C., des penseurs et des artistes grecs. La pensée de Pythagore
(philosophe et mathématicien), par exemple, imprègne les esprits romains. Les
philosophes grecs n’ont pas toujours été bien perçus à Rome, mais ils ont fini
par influencer le mode de pensée romain et le stoïcisme est indissociable de la
philosophie romaine.
A la fin du II° siècle avant J.C. environ, des
médecins grecs viennent à Rome. Jusque là, c’étaient des guérisseurs (experts
dans l’utilisation des plantes médicinales) qui s’efforçaient de soigner leurs
compatriotes. La médecine grecque est plus scientifique et cet art est enseigné
(en langue grecque) dans des écoles privées puis publiques (à partir de l’époque
d’Auguste). Galien, le plus grand médecin de l’Antiquité avec Hippocrate,
s’installe à Rome vers la fin du II° siècle après J.C.
Les Romains traduisent ou imitent les tragédies et
les comédies grecques avant de se mettre à produire des chefs d’œuvre originaux.
Le premier dramaturge latin est en fait un prisonnier grec affranchi, après la
prise de Tarente (en 272 avant J.C.), Livius Andronicus.
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