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Homme d'état et poète athénien. Né à Athènes dans une famille eupatride, il 
écrivit des poèmes élégiaques et iambiques pour faire connaître et justifier les 
mesures politiques qu'il avait prises. Pour les historiens grecs postérieurs, 
ses poèmes étaient la principale source d'informations sur la crise économique 
et sociale à laquelle il tenta de remédier. Ayant acquis à Athènes la réputation 
de bon conseiller lors de la guerre contre Mégare pour la possession de 
Salamine, il fut élu archonte en 594-593. Athènes était alors au bord de la 
guerre civile, en grande partie en raison d'un système agraire qui enrichissait 
les propriétaires fonciers et réduisait les pauvres à la misère, et parfois même 
à l'esclavage. Les réformes de Solon, pleines de sagesse et d'humanité, 
n'empêchèrent pas l'introduction d'une tyrannie (voir Pisistrate), mais elles la 
retardèrent, et l'on peut penser qu'elles ont produit le cadre constitutionnel 
qui facilita plus tard le passage à la démocratie. Dans beaucoup de sociétés 
archaïques, et notamment à Athènes, vendre un homme comme esclave si la vente de 
ses biens n'avait pas suffi à couvrir ses dettes était une pratique admise. De 
nombreux Athéniens, incapables de rembourser leurs dettes, avaient de la sorte 
été vendus comme esclaves en dehors des frontières de l'Attique, ou avaient été 
contraints de s'enfuir pour éviter ce sort ; ou encore ils étaient demeurés en 
Attique asservis à leurs créanciers : ces gens sont peut-être ceux qu'on appelle 
« hectémores », «sizeniers», mot difficile à interpréter, et qui signifie 
peut-être qu'ils devaient livrer à leur créancier le sixième de leur production
(hektos signifie « sixième»). Les deux principales mesures prises par 
Solon pour soulager la misère des paysans sont la suppression de toutes les 
dettes garanties sur la terre ou la liberté; c'est ce qu'on appelle la 
seisachtheia, «libération des dettes» (de 
seiô, secouer, et 
achthos, «fardeau»); et l'interdiction, à l'avenir, de toute créance 
garantie sur la personne du débiteur. Cependant il ne procéda pas à une 
redistribution des terres, comme l'avaient espéré certains des citoyens les plus 
pauvres, et on le lui reprocha. On lui attribue, peut-être à tort, d'autres 
réformes économiques : l'introduction d'un système proprement attique de 
monnaies, de poids et de mesures, l'interdiction d'exporter aucune production 
agricole excepté les olives (il obligeait ainsi les riches propriétaires à 
réserver à la consommation intérieure de l'Attique le surplus de leur production 
de blé, qu'auparavant ils vendaient à l'étranger), et l'octroi du droit de cité 
à des artisans étrangers, afin de renforcer l'artisanat. Solon introduisit aussi 
un code de lois moins sévère : il abolit toutes les lois de Dracon, excepté les 
lois sur l'homicide. Sa grande réforme institutionnelle consista à établir, pour 
la participation à la vie politique, une hiérarchie fondée non plus sur la 
naissance mais sur la richesse : il brisait ainsi le monopole héréditaire du 
pouvoir que détenaient les Eupatrides (le nombre des hommes en droit de briguer 
les plus hautes magistratures fut considérablement augmenté, peut-être doublé). 
Désormais les neuf archontes seraient élus parmi les citoyens les plus riches, 
qu'ils soient ou non de naissance noble ; les citoyens appartenant aux classes 
intermédiaires détiendraient des charges moins importantes ; les citoyens de la 
dernière classe, les plus pauvres, se borneraient à voter à l'assemblée, dont il 
faisait aussi une cour d'appel pour les décisions des magistrats. Les membres 
des quatre classes soloniennes sont appelés (enordre descendant) 
pentakosiomedim-noi, «pentacosiomédimnes», ceux dont le revenu annuel, en 
mesures de blé, n'est pas inférieur à 500 médimnes ; les 
hippeis, « 
cavaliers » (voir chevaux) ; les zeugitai, 
«zeugites», assez riches pour 
entretenir un attelage (zugon, 
«joug») de bœufs, classe qui est celle des 
hoplites ; enfin les thêtes, 
« thètes », ouvriers agricoles libres mais 
dépourvus de terres. Après leur année de charge, les archontes entraient à 
l'Aréopage ; en sorte que la composition de ce conseil, jusque-là exclusivement 
eupatride, allait peu à peu se modifier. Solon institua un second conseil, une
boulé de 400 membres, 100 pour chacune des quatre tribus, tous élus 
annuellement. Selon Plutarque, la boulé 
du temps de Solon était une 
assemblée délibérative qui examinait les questions en cours avant qu'elles 
fussent soumises à l'assemblée du peuple qui en décidait. Enfin Solon modifia 
les fonctions de l'assemblée, mais la portée du changement nous échappe.Certains écrivains postérieurs racontent qu'après avoir institué ces réformes 
Solon voyagea pendant dix ans à l'étranger, notamment à Chypre et en Egypte 
(mais il est chronologiquement à peu près impossible qu'il ait rencontré Crésus 
en Lydie, comme le veut la légende). À son retour à Athènes, il trouva la cité 
déchirée par les luttes civiles et il vécut assez pour voir Pisistrate se faire 
voter une garde du corps, premier pas vers la tyrannie.
 C'est en vers que Solon exprime ses idées et les raisons qui fondent ses 
réformes. Son éloge poétique de l'Eunomia, 
du «bon ordre», concerne 
l'idée de justice tout autant que ses applications pratiques. Dans une réponse 
célèbre au poète Mimnerme, qui voulait mourir à l'âge de soixante ans, Solon 
déclara qu'il valait mieux, pour le poète, mourir à quatre-vingts ans. Il faut 
sans doute, pour comprendre cette réponse, évoquer un autre vers célèbre, par 
lequel Solon affirme que, même en vieillissant, il continue d'apprendre, 
gêraskô d'aiei polla didaskomenos.
 
Source : Dictionnaire de l'Antiquité 
sous la direction de M.C. Howatson - Bouquins
		
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