Techniques de la faïence égyptienne

LES ANIMAUX

La technique de fabrication de la faïence égyptienne

 

Textes extraits de l'exposition : "Faïences de l'Antiquité. De l'Egypte à l'Iran" (Musée du Louvre 2005).

DÉFINITIONS

On appellera faïence (au singulier) un matériau composite dont le corps, fait d'une pâte siliceuse, est recouvert d'une glaçure. La pâte peut être composée de grains de quartz ou de silex finement pulvérisés ou de sable, les grains sont cimentés par une phase vitreuse contenant des alcalins (provenant du natron ou de cendres végétales) et de la chaux. Ces fondants alcalins permettent d'abaisser la température de fusion du quartz; au cours de la cuisson vers 900-1000 °C, une petite partie de la silice fond, une substance vitreuse se forme qui cimente les grains non fondus du corps. Dans un verre, en revanche, tous les ingrédients doivent être fondus au chauffage. La pâte est généralement blanchâtre, sauf lorsque des impuretés lui donnent une teinte grise ou brune. En Egypte, probablement aussi en Syrie et dans la vallée de l'Indus, la pâte a souvent été colorée à dessein pour obtenir des effets esthétiques variés à travers la glaçure transparente.

La glaçure est une fine couche vitreuse de surface ; ce terme a été retenu par les archéologues de préférence à celui d'« émail », couramment utilisé dans le monde de la céramique contemporaine. Les glaçures dites «alcalines» utilisant la soude et la potasse comme fondant sont celles qui ont été utilisées durant toute l'Antiquité en Egypte et au Proche-Orient. Les glaçures plombifères, employant le plomb comme fondant, n'apparaissent qu'à la fin de l'Antiquité et uniquement sur argile, dans certains ateliers comme ceux dits de Tarse (509-527); plus tard encore, des glaçures ont été opacifiées par l'addition d'oxyde d'étain. La glaçure, qu'elle soit alcaline ou plombifère, peut être appliquée sur différents supports, pâte siliceuse, poterie d'argile et certaines pierres. Elle est colorée par ajout d'oxydes métalliques.

La fritte ou, plus exactement, les objets obtenus par frittage se distinguent des faïences par leur absence de glaçure. Le terme de fritte ou frittage recouvre divers procédés employés au cours du temps; pour l'Antiquité, il s'agit essentiellement d'une mixture calcinée de sable et de fondant grossièrement broyés, souvent colorée à cœur, «frittée», c'est-à-dire cuite à relativement basse température pour obtenir des pains bruts ; ces derniers peuvent être utilisés tels quels et servir de pigment; ou bien être réduits en poudre, moulés et chauffés à nouveau pour entrer dans la fabrication de petits objets dont la pâte est colorée à coeur. Dans l'Antiquité, les frittes bleues sont de loin les plus fréquentes et les plus clairement identifiables : le célèbre « bleu égyptien» est une fritte composée de quartz, d'un silicate de cuivre et de calcium, la cuprorivaïte (CaCuSi4O10). Il donne sa couleur à de nombreuses productions : perles, petits vases, éléments d'incrustation.

Couleurs des glaçures

Les glaçures sont colorées par des pigments incorporés dans le mélange. Kaczmarczyk et Hedges (1983) en ont analysé la nature chimique et montré qu'un même élément peut produire des teintes diverses en fonction de son état d'oxydation, de la forme sous laquelle il a été ajouté (solution ou agrégat), de la composition de base de la glaçure (alcaline ou plombifère) ou enfin de l'atmosphère (oxydante ou réductrice) de cuisson. Les analyses font apparaître des proportions et des recettes qui varient selon les ateliers, les régions et les périodes.

Sans entrer dans les détails, on observe que les teintes les plus fréquentes, vert clair ou bleu, sont obtenues avec du cuivre ; le noir est un mélange de manganèse et de fer dont les proportions sont très différentes en Egypte et au Levant ; le jaune est partout (et encore de nos jours) obtenu avec de l'antimoniate de plomb, qui donnera aussi du vert en présence de cuivre ; les bleus foncés intenses proviennent du cobalt et sont peu fréquents au Proche-Orient. Les rouges de fer, connus en Egypte au Nouvel Empire, sont très rares ailleurs. Les mélanges d'oxydes permettent d'obtenir des tons pastel et des demi-teintes qui ont gardé toutes leurs nuances et leur éclat sur les objets provenant d'Egypte où les phénomènes d'altération ont été moins intenses, mais qui se sont souvent bien dégradés en Orient de sorte qu'on ne peut se faire qu'une idée approximative des couleurs d'origine.

Dès le IIIe millénaire av. J.-C., un décor peint était obtenu par application de glaçures de différentes couleurs, la « manière classique », la plus fréquente en Egypte et au Levant consistant à appliquer au pinceau un décor linéaire noir sur le fond vert de cuivre. Les décors de glaçures polychromes (au-delà de deux couleurs) ont été utilisés couramment dans la faïence lorsque les artisans verriers ont su complètement maîtriser les manipulations de verre de couleur, vers le milieu du IIe millénaire av. J.-C.

Une couleur dominante et ses variations : le bleu-vert au cuivre

Le bleu-vert à l'oxyde de cuivre est la couleur Sa plus anciennement attestée, avec le brun-noir de manganèse. Le cuivre étant le métal dominant de l'âge du Bronze, aux IIIe et IIe millénaires avant notre ère, il était facile de se procurer des scories dans les ateliers de métallurgie. On déduit ces réemplois de la présence d'étain et de plomb, minerais qui entrent dans les alliages cuivreux.

Lors de leur cuisson dans une atmosphère oxydante, les sels d'oxydes de cuivre donnent à la glaçure une couleur oscillant entre le bleu franc et le bleu-vert. Les impuretés contenues dans la pâte siliceuse, comme les oxydes de fer, abondants dans le sable du désert, peuvent infléchir la couleur vers le brun et le vert. L'obtention d'un bleu franc dépend du rapport entre sodium et potassium ainsi que de l'emploi de cuivre pur et non des résidus d'alliages cuivreux de métallurgie contenant d'autres métaux tels l'étain et le plomb. Une température intérieure du four élevée favorise le vert : plus il y a d'oxygène dans l'air de cuisson, plus la pièce sera verte. Mais attention : dans une atmosphère de cuisson complètement réductrice, comme lors d'un incendie, l'oxyde de cuivre se transforme en cuprite brun-rouge. Durant la Basse Époque, le vert est assuré par une plus grande quantité de fer associée à une ambiance de cuisson oxydante.

Façonnage de la faïence siliceuse

Les ingrédients fondamentaux de la faïence ne sont ni rares ni précieux. En revanche, la production ne peut se faire qu'au sein d'équipes bien organisées d'artisans spécialisés, au savoir-faire hérité d'une longue tradition.
La malléabilité de ce matériau au moment du façonnage laisse à désirer ; il est impossible de le tourner comme l'argile. Jusqu'au IIe millénaire av. J.-C, on observe souvent sur les objets de faïence des craquelures dues au manque de plasticité du matériau. Les effondrements intervenus entre le moment du modelage et celui de la sortie du four étaient des accidents fréquents. La pâte peut être modelée à la main, pour faire des perles et autres petits objets, ou pressée dans un moule à une valve pour obtenir des formes plus découpées. Ce n'est qu'à partir du IIe millénaire av. J.-C. qu'apparaissent les oeuvres moulées en plusieurs pièces assemblées avant cuisson. Les vases fermés de petite taille sont façonnés autour d'un noyau végétal qui se consume entièrement à la cuisson. Les expérimentations modernes montrent qu'une température à 800-900 °C suffit pour cimenter les ingrédients de la pâte siliceuse et obtenir une glaçure superficielle en une seule cuisson.

Pose de la glaçure

L'obtention de la glaçure s'opère par divers procédés qui ont évolué au cours du temps. Les plus simples sont le trempage ou l'application.

Au cours du trempage, l'objet façonné et séché est plongé dans un mélange glaçurant contenant du quartz, de la chaux et des alcalins très finement broyés et mélangés à de l'eau pour donner une pâte plus ou moins liquide. On applique soit par trempage soit au pinceau ou à la brosse; l'adhérence de ce liquide visqueux dépend de sa composition, de la température de cuisson et de la porosité du corps de l'objet ; on observe des épaisseurs différentes à la surface de l'objet, des coulures ou des gouttes ; celles-ci sont parfois contrôlées afin d'obtenir un effet décoratif.

Des procédés plus complexes ont été observés et reconstitués expérimentalement. Le glaçurage par efflorescence consiste à mélanger dans la pâte brute initiale tous les constituants du corps et de la glaçure à venir ; au cours du séchage, l'eau contenue dans la pâte migre vers la surface, entraînant les alcalins et une partie des oxydes colorants. Ils vont former alors un fin dépôt superficiel qui va réagir à la cuisson avec la silice constitutive pour donner une glaçure très fine. À l'analyse, on observe de nombreux éléments vitreux dans la pâte. Ce procédé appelé « self glazing » (Noble, 1969) ou autoglaçurage est le plus fréquemment employé dans l'Antiquité. Le seul colorant apte à migrer vers la surface avec les sels alcalins est l'oxyde de cuivre. On peut déceler qu'un objet a été fabriqué selon cette méthode par l'examen des creux. Ils sont moins chargés en glaçure que les parties bombées, offrant plus de contact à l'air, où les efflorescences de sels sont plus abondantes.


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