Le pharaon victorieux I (le pouvoir militaire).
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Medinet-Habou |
Musée du Caire - Provenance ? |
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Abou-Simbel |
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Le pharaon victorieux massacrant ses ennemis est l'image qui revient le plus
fréquemment sur les murs des temples. Pendant des millénaires, de
Narmer aux
empereurs romains, les Egyptiens ont gravé inlassablement cette même scène
du pharaon frappant ses ennemis de sa massue tout en les empoignant par les
cheveux. Le pharaon debout sur son char, son cheval foulant les ennemis est
une variante de cette même scène. Pourquoi de telles scènes de massacre?
Précisons tout de suite que ces scènes ne retracent aucune réalité mais sont
conventionnelles, elles rappellent que le pharaon a pour mission de protéger
son pays des ennemis. Ainsi, ces effigies témoignent que le pharaon est le
garant de l'ordre établi par les dieux et qu'il accomplit bien sa mission de
protecteur. Représenter le pharaon triomphant sur les murs et
portes des temples a aussi un sens prophylactique : cela dissuade les mal
intentionnés de pénétrer dans l'espace sacré.
Toutefois, la souveraineté du pharaon ne se limite pas à l'espace égyptien,
mais à " tout ce que le soleil entoure ". Les peuples qui vivent en marge de
l'Egypte sont donc voués à être soumis au pharaon d'Egypte. Le devoir de
chaque pharaon est donc d'élargir les frontières en soumettant les ennemis,
de manière à poursuivre l'aménagement du monde terrestre, lui aussi
assujetti à la Maât.
Durant l'Ancien Empire, l'Egypte vit dans une paix relative, la police
locale suffit à repousser l'incursion des pillards. Il doit cependant déjà
exister une petite armée sous le contrôle du pharaon. Cette force doit
servir surtout à protéger les expéditions commerciales hors d'Egypte pour
alimenter le trésor royal en pierres précieuses et en or. Cette période
prospère et relativement pacifique devait s'achever lors de la première
période intermédiaire avec l'affaiblissement du pouvoir central qui permit à
des asiatiques de s'installer dans le delta de l'Egypte.
Face à ces agressions extérieures, après une nouvelle unification du
territoire, une armée de métier fut instituée. Mais c'est seulement au
Nouvel Empire (à partir de 1150 av JC), que l'Egypte va devenir la plus
grande puissance militaire de son époque et qu'elle va se montrer
conquérante. Les terres proches des frontières sont conquises ou dominées
afin de prévenir toute invasion extérieure. La Nubie passe alors sous
autorité égyptienne jusqu'à la cinquième cataracte. Les petits états du
Proche Orient deviennent des vassaux. Cette politique d'expansion va
permettre un afflux de richesses vers le trésor royal. Seul le roi profite
des tributs et butins acquis, mais il se doit d'être généreux et récompense
ceux qui le méritent. Les temples bénéficient aussi largement de la
générosité royale, en particulier, le temple de Karnak qui abrite le dieu
Amon,,celui qui a accordé la victoire à son fils, le pharaon. Il n'est donc
pas étonnant de trouver sur les murs des temples l'image des victoires
royales car c'est avant tout la célébration de la victoire des forces
positives de l'univers, du monde ordonné sur le chaos. Les étrangers, les
ennemis représentent le désordre, le chaos. Les représenter massacrés ou
captifs, ce n'est pas l'expression d'un acharnement vengeur, d'une
xénophobie primaire, mais de l'accomplissement de la mission du pharaon :
préserver l'équilibre du monde. Les succès militaires du pharaon illustrent
donc la victoire de l'ordre divin. Que se passe-t-il si le pharaon n'est pas
vainqueur? En prenant l'exemple de la bataille de Qadech, qui dans la
réalité n'a été qu'un désastre évité de justesse, on comprend que le pharaon
ne peut pas être vaincu et qu'il doit être éternellement victorieux, la
défaite le remettrait en cause directement, ce serait la faillite de sa
mission première. Ramsès II a fait figurer dans les grands sanctuaires la
bataille de Qadech comme une grande victoire sur les Hittites, la vaillance
du roi y est célébrée partout. Ce "mensonge" avait cependant une fonction
conjuratoire : en montrant la victoire sur les murs, elle devenait réalité.
Aujourd'hui, nous parlerions volontiers d'art de la propagande.
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