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LE PHARAON |
Généralités - Page
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Le pouvoir religieux du pharaon (la Maât)
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Le roi prêtre, le rituel. |
Le pharaon selon les
textes : le garant de l'ordre universel (Maât)
De nombreux textes exposent les conceptions égyptiennes relatives à la
nature des pouvoirs du pharaon. Le texte qui suit, gravé sur le temple de
Louxor, date de la XVIIIème dynastie mais son origine est bien plus
ancienne.
«
Rê a placé le roi sur la terre des vivants,
pour toujours et à jamais, pour juger les hommes et satisfaire les dieux,
pour faire advenir maât et anéantir
iséfet, en donnant des offrandes aux
dieux et des offrandes funéraires aux défunts. Le nom du roi est dans le
ciel comme Rê et il vit d'exaltation comme Rê-Horakhty
; à le voir, les pat
[notables] exultent, et les rékhyt (sujets)
lui adressent des acclamations, sous son apparence de nouveau-né, au
lever de Rê sous la forme de Khépri. »
Le texte rappelle en premier lieu que le pharaon tient toujours son pouvoir
du dieu créateur Rê. Le Livre de la vache (version égyptienne du péché
originel) montre comment la délégation du dieu créateur au pharaon s'est
effectuée. Ensuite sont exposés les mandats confiés par Rê au pharaon pour
bien gouverner :
- "juger les hommes" : pouvoir de justice
- "satisfaire les dieux" : pouvoir religieux
Le texte précise ensuite comment satisfaire les dieux : "faire advenir
Maât
et anéantir Iséfet".
La création du monde a consisté à faire émerger du chaos initial un univers
organisé. Mais par la suite, Rê en abandonnant la direction du monde, les
hommes, imparfaits, furent obligés de travailler pour se nourrir et gagner
leur propre salut. La création du monde n'étant pas définitive mais
renouvelable chaque matin (le texte compare le soleil levant à un
"nouveau-né"), les dieux doivent sans cesse maintenir l'ordre universel (maât)
qui est constamment menacé par les forces du chaos (Iséfet). Mais pour ce
faire, les dieux doivent être forts, "nourris par les offrandes". Le pharaon
a donc la mission vitale, pour la pérennité du monde, de rendre le culte aux
dieux afin que Maât triomphe d'Iséfet. Si
le pharaon ne satisfait pas Maât, le monde pourrait retourner au chaos
primitif. Maât exprime l'harmonie
universelle (retour chaque jour du Soleil, venue régulière de la crue du
Nil...), Iséfet concrétise toutes les formes de troubles, naturels ou
humains (tremblements de terre, inondations destructrices, guerres civiles,
épidémies...).
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Le pharaon Séthi Ier
faisant l'offrande de Maât à la triade osirienne.
Temple
d'Abydos. |
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Fille de Rê, Maât est représentée comme une divinité
coiffée d'un bandeau qui retient une plume d'autruche symbolisant par sa
légèreté la justice et la vérité. Dans le sanctuaire des temples, Maât est
offerte à la statue du dieu, avec son repas matinal. En retour, le dieu
vivifié par l'offrande aide à maintenir l'équilibre de la création. Maât
représente aussi l'ordre social : tous les Egyptiens et le pharaon en premier,
doivent se conformer à ses règles. La déesse prône la bonté, la charité,
l'obéissance et le respect. Elle condamne la malhonnêteté, le mensonge,
l'avarice, la paresse. En tant que déesse de la justice et de la vérité, elle
guide les juges lors du jugement dernier dans la pesée du coeur.
La déesse Maât - Musée archéologique de
Florence. |
Comptable de ses actes devant Maât, le pharaon, en théorie, ne peut
se transformer en despote, toutefois, le roi a bien le pouvoir absolu, comme
le soleil domine la terre, le pharaon domine les deux composantes de la
société, les "pât" (les fonctionnaires) et les "rékhyt" (le peuple simple
exécutant). Les fonctionnaires (privilégiés) expriment leur adhésion active,
ils "exultent", le peuple a un rôle réduit, il se soumet à l'ordre établi,
il porte des "acclamations". |
Le roi prêtre, le rituel.
Pharaon, détenant le
pouvoir religieux, il se doit d'assumer les rites imposés par la religion.
Qu'est-ce qu'un rite?
Un
rite est une action normalisée, souvent répétitive et dont l'efficacité ne
peut pas être mise en doute. Le rite est constitué de paroles et de gestes
considérés comme efficaces même si dans la réalité on ne le constate pas.
L'action rituelle est opérante dans l'instant où le rite est accompli, elle
peut se dérouler sans témoins ou devant un large public. Si le rite se
déroule en présence de témoins, le rôle de ces deniers est de rendre compte
de l'accomplissement du rite et d'en assurer la publicité. Le pharaon
accomplit certains rituels dans le secret du sanctuaire devant la statue de
son père divin car il est le seul responsable devant le dieu créateur de
l'équilibre du monde. Mais quand il s'agit de proclamer la divinité du roi,
le rite se déroule devant une nombreuse assistance, tel le couronnement ou
la fête Sed.
Exemple de rite en présence de témoins : l'ouverture de la bouche et des yeux de la momie du
pharaon.
Ce rite ne peut être accompli par le pharaon lui-même puisqu'il est mort, mais
c'est en général son descendant, son fils aîné, celui qui va devenir pharaon
qui accomplit le rite (donc un pharaon en puissance). Le futur pharaon revêt
la peau de léopard des prêtres et procède au rite à l'aide de gestes
(présentation de l'herminette devant la bouche et les yeux) et en prononçant
des paroles magiques. Au moment même de l'accomplissement du rite, le pharaon
défunt (la momie) est sensé retrouver la vie, l'usage de ses sens : la parole,
la vue... Mais dans la réalité l'efficacité du rite n'est nullement visible.
Le rite s'effectue devant toute la famille du défunt qui pourra témoigner de
la régularité de l'enterrement et celui qui accomplit le rite exerce et
proclame sa légitimité de fils héritier en prenant soin publiquement de son
père défunt.
Exemple de rite "secret" et la délégation
du pouvoir : chaque jour, dans le secret des sanctuaires, il
faut soigner la statue divine, telle une personne. Le rituel commence le matin
par le réveil du dieu après son sommeil nocturne. Ensuite, il faut faire la
toilette du dieu, l'habiller, le parer de ses amulettes protectrices et le
faire manger. Ce rituel se compose de gestes et formules compliqués qui
doivent se répéter à l'identique chaque jour. Le
pharaon ne peut assumer physiquement ce rituel dans tous les temples de
l'Egypte, il délègue donc une partie de son pouvoir religieux au clergé pour
accomplir cette tâche à sa place. Toutefois, il demeure le seul responsable et
le seul interlocuteur possible avec les dieux.
C’est pourquoi
dans les scènes figurées des temples, c’est toujours le roi qui est représenté
accomplissant le rituel divin journalier. Pour éviter que le dieu ne soit
choqué d'être servi par un officiant inconnu, ce dernier, avant d'ouvrir
l'armoire renfermant le dieu, commence par prononcer les paroles rassurantes
"C'est le roi qui m'a ordonné de voir le dieu". Ainsi, le dieu sait que le
prêtre officie au nom de son fils, le pharaon.
L'exception avec Akhenaton : il y a cependant eu un exemple, avec Akhenaton, où le roi n'a pas délégué son
pouvoir religieux. Chez ce pharaon, considéré comme hérétique par les autres,
l'objet de vénération est le couple royal lui-même, transposition dans le
monde réel du couple céleste Rê-Hathor. Seuls Akhenaton et son épouse
Néfertiti peuvent rendre le culte à Aton, le dieu unique solaire, sur l'autel
à ciel ouvert, du temple oriental de Tell el-Amarna. Dans cette perspective,
les prêtres deviennent inutiles et perdent leur pouvoir. On comprend pourquoi
ils n'acceptèrent jamais la réforme religieuse d'Akhenaton.
La statue de substitution : Quand
les fêtes ont un objectif à la fois religieux et politique, le pharaon peut
déléguer un de ses fidèles, non prêtre, pour le remplacer dans la cérémonie. Mais parfois, on a recours à un
autre procédé, on utilise la statue du pharaon absent. A Karnak, devant le
temple de Séthi II, deux statues colossales représentaient le roi marchant et
tenant le bâton sacré d'Amon utilisé pour guider les processions. Ces
statues avaient pour rôle de rappeler la présence virtuelle du roi ritualiste.
De plus, une statue du roi, grandeur nature, tenant la canne et la massue
comme tout pharaon marchant vers le temple, était placée sur un traîneau en
bois. Cette statue était traînée par les prêtres lors des processions et
servait donc d'image de substitution. Ce système de substitution d'un être
vivant mais physiquement absent rappelle la statue utilisée pour les défunts.
Le roi ritualiste absent devient, sous la forme de sa statue, le bénéficiaire
d'un rituel adressé à son ka, comme pour la statue d'un défunt. Il y a donc,
en quelque sorte un renversement des rôles, le roi qui devait accomplir les
rites se voit, du fait de son absence, le bénéficiaire des rites.
Les cas où le roi ritualiste ne peut pas déléguer son
pouvoir : il y a cependant des circonstances où le roi ne peut recourir à la délégation
et doit assumer lui-même la liturgie. C'est le cas par exemple des grandes fêtes
à Thèbes, la fête d'Opet et de la fête de la Vallée où le pharaon ouvre la
procession, portant le bâton sacré du dieu Amon.
Le roi ritualiste au service de son peuple
: à la fin de la IIIème dynastie, apparaît une formule qui sera reprise
constamment sur tous les temples funéraires : "nésout-di-hotep". La traduction
de cette formule pose problème, on pourrait la traduire par "Puisse le roi
faire que soit satisfait" le dieu (ou les dieux) de sorte qu'ils accordent une
offrande incantatoire au bénéfice du défunt. L'offrande incantatoire est
l'acte rituel effectué par la famille du défunt qui invoque le mort et les
offrandes placées sur la table d'offrandes devant la stèle funéraire. Par cet
acte magique, le défunt pourra bénéficier dans l'au-delà des offrandes. Il
semble que le transfert des offrandes réelles vers le monde imaginaire dépende
d'une action du roi auprès des dieux. Le roi ritualiste utilise son pouvoir
pour demander aux dieux d'accorder individuellement aux hommes le pouvoir
magique qui s'opère dans l'offrande incantatoire.
Le roi ritualiste est un savant :
l'accomplissement des rituels implique que le souverain officiant possède le
savoir et les compétences pour accomplir cette tâche. Au Nouvel Empire, dans
le culte direct à l'astre solaire, le roi entonne un hymne où il se présente
comme un prêtre solaire, déclinant l'étendue de ses connaissances : " le roi
(nom du pharaon) connaît les paroles secrètes prononcées par les âmes de
l'Est... il connaît le lieu où ils se trouvent quand Rê point au début de son
chemin...". Le pharaon se repose bien évidemment sur les compétences
religieuses des prêtres mais c'est lui qui ordonne la fabrication des
nouvelles images divines, c'est lui qui consacre tous les objets nécessaires
au culte.
La fonction essentielle
du pharaon est donc bien l'accomplissement des rituels.
La source principale
utilisée pour cette partie "le pharaon ritualiste" est le catalogue de
l'exposition "Pharaon" p128 à 135 (par Claude Traunecker)
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Sommaire de la
partie "Généralités"
- Les
premiers pharaons
- La
mission du pharaon d'après les premières palettes à fards
- Le
pharaon est un Horus
- Les
origines de la royauté
(La
transmission du pouvoir - Le pharaon : homme ou dieu? - Les conditions qui ont
favorisé l'apparition de la monarchie).
-
Le
pouvoir religieux du pharaon (la Maât) - Le roi prêtre (le rituel)
- Les
emblèmes du pouvoir royal (I) : les couronnes - l'uræus - le vautour
- Les
emblèmes du pouvoir royal (II) : les Sceptres et la croix ânkh
- Les
emblèmes du pouvoir royal (III) : la barbe postiche
- Les
emblèmes du pouvoir royal (IV) : le pagne, les sandales, la queue de taureau
- Le
pharaon et les symboles animaliers
- La
titulature du pharaon (2 pages)
- Le
palais royal (2 pages)
- Le
pharaon et l'administration (le pouvoir politique
du pharaon - le vizir - le pouvoir local - les fondations)
- Le
thème du pharaon victorieux (le pouvoir militaire
- 3 pages)
- La
mort du pharaon
- Les
femmes pharaon (Le
rôle des reines dans la vie politique et religieuse)
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