Thoutmosis III ("Thot est mis au
monde"), fils de Thoutmosis II et d'une de ses concubines (Isis), accède
réellement au pouvoir 22 ans après son avènement officiel, après le règne
d'Hatshepsout. Durant la longue période de corégence avec sa belle-mère, il
avait été totalement écarté des décisions politiques, Hatshepsout régnant en
souveraine sans partage.
Comme tous les pharaons, Thoutmosis III a eu plusieurs épouses, il se marie
d'abord avec sa demi-soeur, puis la fille de la nourrice royale, puis une
reine au lignage incertain qui donnera naissance à Aménophis II, plus les
concubines.
Thoutmosis III est considéré comme un grand pharaon, sans doute le plus
grand conquérant qu'ait connu l'Egypte antique (certains l'appellent "le
Napoléon de l'Egypte ancienne").
Les conquêtes militaires
Le récit de ses dix-sept expéditions victorieuses nous est connu grâce à des
inscriptions au coeur du temple d'Amon à Karnak (sur le mur dit "des
annales").
- En Nubie : Thoutmosis III étend son
pouvoir sur la zone comprise entre la 3ème et la 4ème cataracte et place
sous surveillance les régions plus au sud (une stèle dressée à Kourgous en
témoigne).
- En Syro-Palestine : contre les princes
syriens coalisés (ennemis héréditaires de l'Egypte), Thoutmosis III
s'illustre en défendant Qadesh, au débouché de la Bekka. Il fait preuve
d'une stratégie remarquable à Meggido, il surgit par un passage difficile
(le défilé d'Arouna) alors que ses ennemis l'attendaient par l'accès le plus
facile. La ville est prise après un siège de sept mois.
- En Mitanni : dans ce royaume* de
Haute-Mésopotamie, situé sur les bords de l'Euphrate, à l'est de l'actuelle
Alep, Thoutmosis III met en oeuvre, ici encore, une stratégie astucieuse. Il
achemine sur des chariots tirés par des boeufs des navires de la côte
libanaise jusqu'à l'Euphrate. Les villes situées le long du fleuve sont
ravagées et doivent payer tribut. L'armée remonte jusqu'à Ninive, aucun
pharaon n'avait pénétré aussi loin en Asie. Une stèle frontière est dressée
sur l'Euphrate.
* le royaume est composé de Hourrites mais dirigé par une aristocratie
indo-européenne.
Au retour, Thoutmosis III se distrait en faisant une chasse à l'éléphant à
Niya, il en massacre 120 et rapporte les défenses comme butin. Il saura user
de ces hauts faits (roi chasseur et roi qui repousse les frontières) dans sa
propagande.
L'organisation de
l'Empire conquis
Suite à ces conquêtes, l'Egypte met en place des garnisons aux endroits
stratégiques, les cités syro-palestiniennes conservent une certaine
autonomie de gouvernement mais sont assujetties à l'impôt. Des méthodes
d'acculturation sont mises en place :
- des sanctuaires dédiés à des divinités égyptiennes sont érigés
- les enfants des princes locaux sont emmenés à la Cour pour recevoir une
éducation égyptienne. Ensuite, ils sont renvoyés dans leur famille afin de
devenir les meilleurs ambassadeurs de l'Egypte. Certains restèrent cependant
en Egypte et y firent une brillante carrière.
Les constructions
Les campagnes militaires ont des conséquences économiques bénéfiques.
L'afflux des richesses permet des constructions prestigieuses, le scribe
Minmès dit avoir suivi dix-neuf chantiers commandités par
Thoutmosis III.
- Karnak : creusement du premier lac
sacré - addition d'un sixième pylône (bas-reliefs retraçant la prise de
Meggido) - construction du septième pylône (le roi y est représenté en
vainqueur des Asiatiques) - érection de deux obélisques en granit rose
devant le septième pylône - construction de l'Akhmenou, immense salle
dédiées aux jubilés des pharaons avec un jardin botanique (une salle décorée
d'oiseaux et de plantes exotiques, souvenirs des campagnes lointaines).
- Eléphantine : poursuite de la
construction du temple de Satet.
- Deir el-Bahari : construction d'un
temple sobre étagé entre celui de Mentouhotep II et Hatshepsout.
- Dans le delta : nombreuses
constructions
- En Nubie
: construction des temples de Horus, Khnoum, Dedoum
-
Vallée des Rois :
Thoutmosis III fait creuser sa
tombe (N° 34) dans une anfractuosité inaccessible, il y sera enterré à l'âge
de soixante ans environ. La
tombe est décorée du Livre de l'Amdouat mais
n'est pas impressionnante pour un pharaon de cette importance. Sa momie fut
retrouvée dans la cachette de Deir el-Bahari avec celles d'autres pharaons.
A noter qu'une grande partie de ces constructions avaient été entreprises
par Hatshepsout, ce qui témoignerait que Thoutmosis III se considère comme
son continuateur et qu'il n'avait aucune raison d'effacer sa corégente de
l'Histoire.
Un pharaon apprécié
Compte tenu de ses victoires
militaires, de ses nombreuses constructions et représentations, Thoutmosis
III est un pharaon bien connu et apprécié du grand public. Il apparaît aussi
comme un esprit cultivé, connaissant l'écriture hiéroglyphique et pratiquant
la calligraphie. Il demande aux théologiens de recopier les Textes des
Pyramides et de composer de nouveaux rituels de cérémonie. Considéré comme
le "père des pères", son culte va perdurer jusqu'à l'époque ptolémaïque.
Alexandre le Grand choisira de restaurer les sanctuaires érigés par
Thoutmosis III s'appropriant ainsi les vertus militaires de son ancêtre.
Après 53 ans de règne
(dont 31 ans effectifs), son fils Amenhotep II* (ou Aménophis II) lui
succède, sans doute après avoir effectué une corégence de quelques années
avec son père.
Amenhotep II* : sa mère est Hatshepsout Méritrê, seconde épouse de
Thoutmosis III. |