L'agriculture est le fondement de la civilisation égyptienne. Pourtant, la
plus grande partie du territoire de l'Egypte est un désert. Seule la
présence du Nil peut expliquer cette contradiction. L'agriculture s'est
développée sur un mince ruban fertile, une oasis longue de 1000 km et qui ne dépasse
pas 15 km en largeur à certains endroits.
90% des
Egyptiens sont des paysans mais ils ne possèdent pas leurs terres. Toute la
terre appartient au pharaon, il en rétrocède cependant une grande partie en
jouissance aux
fondations
(les temples par exemple), aux administrations et aux grands dignitaires
afin qu'ils en tirent leurs revenus. Ces bénéficiaires rémunèrent leur
personnel avec le produit des cultures et doivent des taxes à l'Etat.
Cependant, les fondations obtiennent
souvent l'exemption de l'impôt.
Toute l'activité du paysan égyptien est soumise au rythme du Nil. Les trois
saisons de l'année sont d'ailleurs découpées en fonction des travaux
agricoles :
Akhet : "l'inondation" (du 16/07 au 14/11) |
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Le premier jour de cette saison, et de l'année, correspond au début de
l'inondation. Pendant toute cette période le paysan ne peut pas travailler
dans ses champs qui sont recouverts par l'inondation, mais le travail ne
manque pas car il faut surveiller les digues, les réparer et faire en sorte
que la crue soit bénéfique au maximum des possibilités. Les parcelles
cultivables et non atteintes par l'inondation sont irriguées
artificiellement à l'aide du puits à balancier, le chadouf, qui permet de
puiser l'eau dans le canal d'irrigation le plus proche afin de la répandre
sur le champ.
Le chadouf Nouvel Empire
(vers 1250 av JC) musée du Louvre Fresque de la tombe d'Ipouy à Deir el-Médineh |
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Cette peinture de
la tombe de Sennedjem
montre bien la
disposition des canaux pour l'irrigation artificielle des champs à
l'aide du chadouf (le Nil principal est en bas). |
Péret : "la sortie", la germination (du 15/11 au 18/04) |
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Aussitôt l'inondation terminée, le paysan commence véritablement les travaux
agricoles, la terre est "sortie" (de l'eau) et elle est bonne à labourer.
L'ameublissement de la terre à cultiver peut se faire en utilisant l'araire,
charrue primitive avec un soc en bois qui ne fait qu'égratigner la terre, ou
la houe, instrument en bois, sorte de pioche qui sert à retourner la terre
ou à en briser les mottes. L'araire est soit tirée par des boeufs ou des
vaches, soit par des hommes.
Quand la terre est préparée, le paysan procède aux semailles. Le scribe du
blé surveille le tas de semence pour comptabiliser combien de fois chaque
semeur y puise pour remplir son petit sac en écorce ou en fibres de papyrus
tressés. Les semeurs, sac porté sur l'épaule, répandent le blé sur le champ à la volée.
La dernière opération consiste à enfouir les grains dans la terre fertilisée
par le limon. Pour cela, on emploie à l'époque ancienne des moutons qui
piétinent le champ fraîchement ensemencé. Au Nouvel Empire, on utilise les
porcs pour effectuer cette tâche. Hérodote dit avoir vu cette façon de
faire dans le delta.
Il se peut aussi que parfois les labours soient inutiles si la terre est
bien ameublie, dans ce cas, le paysan procède directement aux semailles.
Pendant toute la croissance du blé, il faut veiller à alimenter les canaux
d'irrigation en eau et procéder au désherbage des mauvaises plantes. Quand
la culture a atteint une certaine taille, les scribes viennent mesurer avec
leur corde d'arpenteur les surfaces cultivées afin d'établir les redevances
et vérifier si les bornes des champs n'ont pas été déplacées.
Chémou : "chaleur", la saison des récoltes (19/04 au 11/07) |
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Quand la plante a atteint sa maturité, on procède à la moisson, le blé a
alors atteint ou même dépassé la hauteur d'un homme. Le blé est coupé
ou plutôt scié à l'aide d'une faucille à dents (lames en silex, puis de
bronze). Les moissonneurs récoltent
seulement les épis, le chaume reste en place assez haut sur le champ. Le
travail se fait rapidement et est souvent cadencé par un joueur de flûte.
Dans les moments de repos, des servantes apportent la collation et à boire
aux moissonneurs.
Les épis sont ensuite rassemblés en gerbes. Mais comme les tiges sont trop
courtes pour vraiment former une gerbe, on superpose, tête bêche, les
extrémités inférieures de deux gerbes (les épis tournés vers l'extérieur)
pour les lier ensemble par leur milieu. La première gerbe est remise au
maître du domaine afin qu'il se rende compte de la qualité de la récolte.
Les autres gerbes sont regroupées en tas de quatre à cinq.
Les épis perdus sont ramassés par des glaneuses qui les mettent dans de
petits sacs.
Il faut maintenant transporter les gerbes d'épis sur l'aire de battage. Le
transport s'effectue à l'aide de grands paniers portés par deux hommes.
L'âne est aussi utilisé dans cette tâche pour épargner de la peine
aux hommes.
Les gerbes sont ensuite dénouées pour que les épis puissent être disposés
sur l'aire de battage. Le grain est extrait de l'épi soit par le battage,
soit par le dépiquage.
Le battage est réalisé par les hommes qui à l'aide d'un fléau frappent les
épis afin d'en faire sortir le grain.
Le dépiquage utilise les animaux (boeufs ou ânes) qui foulent les épis pour
libérer le grain.
Après avoir retiré, à l'aide de tridents, la paille séparée du grain, il
faut procéder au vannage pour éliminer les balles mélangées au grain.
Il s'agit de lancer en l'air vivement le mélange grain-balles, le grain,
plus lourd, retombe sur place tandis que les balles, plus légères, sont
emportées par le vent. Pour ce travail effectué le plus souvent par les
femmes, on utilise des vans qui peuvent être
des sabots de boeufs évidés, des palettes courbées ou des coupes en bois. Les dernières
impuretés peuvent être éliminées à l'aide d'un tamis.
Une mesure de blé, comme échantillon, est alors portée au propriétaire du
domaine. On n'oublie pas non plus d'honorer les dieux en leur offrant les
prémices afin de les remercier de la récolte. On honore le dieu local et
plus spécialement les dieux Min (fertilité) et
Renenoutet (déesse serpent,
divinité des moissons).
Il ne reste plus qu'à évaluer la récolte avant de la faire transporter dans
les greniers. Deux fonctionnaires, le scribe des greniers et le mesureur de
grain s'acquittent de cette tâche. Les paysan conservent une petite partie
de la récolte.
Les greniers sont toujours construits sur le même plan. Ils sont rassemblés
en une ou deux rangées dans une cour entourée de murs. En pisé, ils sont de
forme conique et atteignent une hauteur de 5 m pour un diamètre de 2 m. Deux
petites ouvertures, une en haut, l'autre à mi-hauteur permettent de remplir
puis de vider le grenier.
Tombe d'Onsou XVIIIème
dynastie Musée du Louvre 68X94 cm (lecture : de bas en haut, de gauche à
droite) |
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Les labours avec l'araire et la houe.
Modèles en bois provenant de tombes de l'Ancien et du Moyen Empire. |
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Domaine avec 5 greniers dont 3 sont déjà remplis (schéma). Deux espèces
de céréales étaient surtout cultivées dans l'Egypte ancienne : l'orge (yôt)
pour fabriquer la bière et le froment (bôte). Il y avait plusieurs
variétés de ces deux céréales mais il est très difficile de les
identifier aujourd'hui. |
A côté des céréales, on cultive la
vigne, le
lin, les arbres fruitiers
et les légumes. Les principaux légumes cultivés sont les choux, les oignons, les
concombres, les courgettes, les melons, les poireaux, les laitues, de
l'ail, de la coriandre, des lentilles, des fèves, des pois chiches, des
haricots. De
nombreuses variétés d'arbres étaient cultivées : palmiers dattiers et
doum, figuiers, grenadiers, sycomores, caroubiers.
L'élevage est aussi une activité importante de l'agriculture.
L'animal le plus représenté dans les tombes est le boeuf et la vache. Ce
sont certes des animaux très utiles pour le travail qu'ils peuvent
effectuer et pour les ressources alimentaires qu'ils procurent, mais ce
sont aussi des animaux sacrés. Hathor, la déesses de la maternité, de
l'amour, de la joie est représentée sous la forme d'une vache. Le
taureau incarne le courage et la force. Aux époques primitives, on
représentait le roi combattant sous la forme d'un taureau. Les bovins
trouvaient leur nourriture dans les marécages du delta et il semble
qu'ils étaient fréquemment gavés avec de la pâte à pain.
Les moutons, les ânes, les chèvre et les porcs (peu représentés dans les
tombes) étaient aussi élevés en grand nombre. Mais à côté de ces animaux
domestiques, on trouvait également des animaux sauvages que l'on
capturait dans le désert ou dans les montagnes au moyen de lévriers ou
de lassos : antilopes, gazelles, bouquetins, hyènes (que l'on
gavait)...
Les oies sauvages étaient capturées au moyen de grands filets puis
gavées. Les nombreux oiseaux migrateurs étaient de même capturés :
canards, cygnes, grues, pigeons... D'après les décomptes des scribes, le
bétail était sans doute beaucoup plus abondant à l'époque antique
qu'aujourd'hui. Sous Ramsès III, les temples égyptiens reçurent en 31
années, 514 968 têtes de gros bétail et 680 764 oies. Le cheval et le
mulet ne furent introduits que pendant la période intermédiaire entre le
Moyen et le Nouvel Empire.
Savoir-Plus sur l'élevage |
Conclusion : l'agriculture a atteint un degré de perfectionnement
élaboré en Egypte antique et a permis de donner de la puissance au pays.
Les mérites en reviennent en premier aux paysans bien que ces derniers
aient bien peu profité de cette prospérité. Et le passage ci-dessous,
maintes fois repris pour vanter le travail du scribe par rapports aux
autres métiers, est à peine exagéré : "Le ver a enlevé une moitié (du
grain), l'hippopotame a dévoré
l'autre (moitié). Il y a
beaucoup de souris sur le champ, la
sauterelle s'est abattue, le bétail a (tout) dévoré, les moineaux
se livrent au pillage. Oh, malheur au
paysan ! Le reste, qui se trouvait sur l'aire, les voleurs l'ont
réduit à rien. L'attelage a péri
(d'épuisement) à force de dépiquer et de labourer. Voici
que le scribe débarque au quai et
veut faire rentrer la récolte.
Les employés portent des bâtons et
les nègres portent des verges
en côtes de palmes, Ils disent :
«
Donne-nous du grain ! » S'il
n'y en a pas, ils le frappent,... il est garrotté et jeté dans le
canal, et il coule à pic la tête la première (?). On garrotte sa femme
devant lui et on charge ses enfants de liens. Ses voisins les abandonnent
en fuyant pour mettre leur grain en sûreté".
D'autres détails
sur la condition du paysan
Autre page sur l'agriculture avec une mise en page différente pour les
sixièmes
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