Le nil aujourd'hui

LE  NIL

AUJOURD'HUI

Le Nil aujourd'hui : une précieuse ressource en eau très disputée
Depuis le début du XIXème siècle, le Nil a été l’objet d’importants aménagements afin de régulariser son cours et de permettre l’irrigation des terres. Les principaux barrages construits :
- Le plus grand barrage se trouve à Assouan, en Egypte. Un premier barrage fut construit en 1902 puis rehaussé en 1936. Un deuxième barrage, plus en amont ("le haut-barrage") fut commencé en 1960 avec l'aide des Soviétiques et achevé en 1971 (digue haute de 111 m, de 3 820 m de longueur, de 980 m de largeur à la base). Ce barrage retient l’un des plus grands lacs du monde : le lac Nasser (5 180 km2 - réserve d'eau de 157 à 185 milliards de m3, soit 5 fois le débit total annuel du fleuve).
- Le barrage Sennar a été construit sur le Nil bleu, au sud de Khartoum afin de constituer des réserves d’eau destinées aux plantations de coton au Soudan.
- Un autre barrage a été construit, en 1937, à Jabal Awliya sur le Nil blanc.

Le partage des eaux du Nil est basé sur un accord égypto-soudanais signé en 1959, et aujourd'hui contesté par les autres pays riverains qui réclament leur dû.
Au terme de ce traité bilatéral, l'Egypte et le Soudan se partagent effectivement près de 90 % des ressources du fleuve : 55 milliards de m3 annuels pour l'Egypte et 18 milliards pour le Soudan. En théorie, il ne reste donc que 11 milliards de m3 disponibles pour tous les autres pays (le débit annuel du Nil est estimé à 84 milliards de m3).
L'Ethiopie demande une révision de ce partage mais jusqu'ici, l'Egypte a toujours refusé de renégocier l'accord de 1959. Selon TeccoNile, l'organisme de coopération technique sur le Nil, la population du bassin fluvial atteindrait aujourd'hui 250 millions de personnes. Si le taux actuel d'accroissement se maintient, elle atteindra 400 millions en 2025 et près d'un milliard en 2050.
Pour répondre à cette pression démographique, l'Egypte, avec le projet Toshka, veut constituer dans le sud du pays une seconde vallée du Nil parallèle à la première. La densité de la population dans la vallée du Nil est de 1600 hab/km2, alors que le désert est vide de peuplement. Ce projet ("Nouvelle Vallée") de mise en valeur du désert est donc lancé pour augmenter la surface des terres cultivables. L'Egypte a entamé en 1987 le creusement du canal  Al Salam pour acheminer les eaux du Nil vers le Sinaï. En 1997, le canal Toshka est également lancé et inauguré en 2003. Le canal est long de 302 km et relie Toshka (près d'Abou Simbel, à 40 km de la frontière du Soudan) au lac Nasser dans lequel l'eau est puisée par 21 pompes à raison de 25 millions de m3 par jour (la plus grande station de pompage du monde). Ces travaux devraient permettre d'irriguer 15 000 km2 de terres et l'installation de 3 à 5 millions de colons à l'horizon 2017. Mais on peut se demander si cette entreprise est réaliste car la capacité du Nil a déjà atteint ses limites et l'irrigation intensive entraîne la salinisation des terres et favorise donc la désertification. Ce projet pharaonique risque donc de ne pas donner les résultats escomptés.


 Le barrage d'Assouan (image satellite)

Pour ou contre le barrage d'Assouan
Beaucoup de critiques ont été avancées contre l'édification du barrage d'Assouan. Reste à déterminer si les aspects négatifs l'emportent vraiment sur les aspects positifs.
Les aspects positifs
- Au niveau politique : il a permis de légitimer la prise de pouvoir de Nasser
- Au niveau économique : il a sauvé la population de la famine en augmentant la surface cultivable, en rendant possible plusieurs récoltes par an, en évitant les distorsions entre années de vaches maigres et de vaches grasses. Il a, grâce à l'électricité fournie (9 millions de Kw/h par an), permis la modernisation et l'industrialisation du pays. Les investissements ont été amortis seulement en deux ans.
- Il permet de se protéger contre les crues dévastatrices et les années de sécheresse (l'Égypte fut en effet préservée des inondations de 1964 et 1973 et des sécheresses de 1972-73 et 1983-84)
- Il a régularisé la navigation sur le fleuve

Les aspects négatifs
En amont du barrage
        - de vaste étendues ont été englouties par les eaux, 150 000 Nubiens ont dû être déplacés. Ils ont été relogés pour
          moitié en Egypte, près de Kom Ombo à 14 kilomètres au nord d'Assouan et pour moitié dans le nord-est du Soudan,
          à Kachem el-Gouba.
        - au niveau archéologique, de nombreux sites ont été définitivement perdus et même pas fouillés
        - le risque de tremblement de terre a augmenté (résultat des pressions inhabituelles qui s'effectuent sur l'écorce
          terrestre lors du remplissage et de l'évacuation des eaux)
        - la quantité d'eau perdue par évaporation (11% par an) et infiltration est très importante
        - l'eau perd de son oxygène en profondeur ce qui favorise l'apparition de molécules toxiques
        - L'écosystème est perturbé : le bassin devient un lieu de pêche (2000 tonnes par an) et attire les nomades qui sont
          exposés à des maladies provenant des eaux stagnantes
        - les sédiments se déposent dans le bassin et menacent de créer un nouveau delta (le bassin sera rempli dans moins
          d'un siècle)

En aval du barrage
        - Le limon fertile se déposant dans le bassin, il ne va plus enrichir les champs qui s'appauvrissent
        - L'équilibre naturel du delta est rompu et la côte, jadis renforcée par les sédiments, est        
          fragilisée (l'érosion attaque la côte)
        - L'eau du delta devient de plus en plus salée, ce qui favorise le développement du biomphalaria, un escargot qui
          provoque des maladies intestinales et le déclin des poissons (migration, des bancs de sardines)
        - Le remplissage constant des canaux d'irrigation développe auprès des paysans la bilharziose dont un cas sur dix est
          mortel.
        - Le lit du fleuve s'érode faute de sédiments et la salinisation provoquée par l'irrigation détruit les sols
        - Faute de limon, la fabrication des briques a disparu
        - L'augmentation du niveau moyen du Nil toute l'année provoque une humidité dommageable aux tombes et aux
           monuments (il faut drainer une partie de la vallée)
        - Le barrage pourrait engloutir toute l'Egypte s'il était détruit (séisme, guerre, acte terroriste...)

Le problème du déplacement des temples

De 1963 à 1968, l'UNESCO, à la demande de l'Egypte et sous l'impulsion de Christiane Desroches-Noblecourt et d'André Malraux, mena la campagne de sauvetage des temples d'Abou Simbel et de ceux de basse Nubie. Le déplacement des 24 temples et chapelles fut une véritable prouesse technique et fut mené de façon remarquable. Les temples furent découpées en blocs (certains de 30 tonnes) et remontés à l'identique 60 m plus haut hors d'atteinte des eaux.
Agrandir le document ci-contre pour voir la liste et la localisation des temples sauvés.
Quatre temples ont été offerts à différents pays donateurs et se trouvent aujourd'hui au musée de Turin (spéos d'Ellesiya), dans un parc de Madrid (temple de Debod), à Leyde (temple de Tafa) et au Metropolitan Museum de New York (temple de Dendour).
En revanche, d'autre temples furent définitivement engloutis dans les eaux du Nil : le petit temple d'Horus à el-Seboua, un des deux temples de Tafa, Gerf Hussein, le fort de Kouban (XIIe dynastie), le fort du Moyen Empire et le temple de la XVIIIe dynastie d'Aniba, ainsi qu'une partie de Kasr Ibrim.

On accuse souvent le barrage, du fait de la montée de la nappe phréatique, de contribuer à la destruction des monuments par remontée de l'eau dans leurs parois par capillarité. Or, une étude de l’Institut Français d’Archéologie Orientale a montré qu'au contraire ce phénomène avait été considérablement réduit avec la construction du barrage car la nappe phréatique est stabilisée et a moins d'amplitude qu'au temps de la crue. Les dégâts constatés par ce phénomène sont bien réels mais datent d'avant la construction du barrage.

Le bilan n'est donc pas facile à établir de façon catégorique, chacun se détermine en fonction des priorités qu'il accorde à l'économie, au culturel à l'environnement ou au religieux. Mais il est évident que le Nil d'aujourd'hui, domestiqué, n'ait plus celui de l'Antiquité. Certains acceptent difficilement de voir un tel symbole divin dominé  par l’homme et sa technique.

Entrée de la route sur le barrage Le Nil en aval du barrage Le lac Nasser
Paysage vu du barrage Installations hydro-électriques Installations hydro-électriques

Photos du barrage d'Assouan 2004


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