Nous avons expliqué dans la partie sur la mort les raisons de la
momification : personne ne peut accéder à la vie éternelle si son corps
n'est pas conservé. Il s'agit maintenant d'exposer les techniques utilisées
pour conserver le corps après la mort, le "momifier".
Le mot "momie" n'est pas le mot
employé par les Egyptiens eux-mêmes, il dérive de l'arabe "mumya" qui
signifie "bitume" (
Voir la momie de Padiimenipet
au Louvre
). Dès le XIème siècle, les médecins arabes récupèrent le baume
des momies égyptiennes pour en faire des médicaments très prisés en
occident. On a longtemps pensé que les Egyptiens n'avaient utilisé le bitume sur
les momies qu'à l'époque gréco-romaine, mais Jacques Connan, Professeur
Honoraire à l'Université de Strasbourg (Laboratoire de Biogéochimie
Moléculaire) a démontré dans son ouvrage "Le bitume dans l'Antiquité"
(Errance 2012) que l’utilisation du bitume sur les momies était très
ancienne : au Nouvel Empire, le bitume est présent dès la XIXe
dynastie (vers 1300 av. J-C) et il perdurera jusqu’à la fin de la
momification, à l’époque romaine. Il n'est pas exclu que le bitume
ait été utilisé encore bien plus tôt, à la XVIII° dynastie (vers 1500
av. J-C) c'est plus que probable.
Voir la
conclusion d'un article de Jacques Connan "La momification dans
l’Egypte ancienne : le bitume et les autres ingrédients organiques des
baumes de momies"
La
momification artificielle, beaucoup plus ancienne qu'on ne le pensait :
On pensait
jusqu'ici que l'usage de la momification artificielle (par embaumement)
remontait à 2.400 av. J.-C. (avant cette date,
les corps des défunts auraient été préservés par dessèchement naturel
sous l'action du sable chaud et sec du désert).
Mais
une momie égyptienne, "Turin S. 293", exposée au musée égyptien de Turin
(Italie) et datant de 3700-3500 avant J.C., vient perturber l'histoire
:
le procédé de momification est bien plus ancien - d'un bon millénaire
- qu'on ne le pensait jusqu'ici. "Une bonne dose d'huile végétale ou de
graisses animales, un brin de résine de conifère chauffée, quelques
extraits de plante aromatique et un peu de sucre végétal": telle est la
recette qui fut ainsi utilisée dès 3.500 avant J.C., selon une étude
publiée dans le Journal of Archaeological Science.
https://www.york.ac.uk/news-and-events/news/2018/research/mummy-embalming-turin/
https://www.maxisciences.com/momie/une-momie-egyptienne-vieille-de-5500-ans-renverse-nos-croyances-sur-l-embaumement_art41376.html
Avant de pratiquer la momification, les Egyptiens enterraient leurs morts dans des
tombes remplies de sable. Ils s'aperçurent très vite que la sécheresse
du climat déshydratait les corps qui de ce fait se conservaient
naturellement. Mais quand
les tombes remplies de sable furent remplacées par les mastabas
remplis d'air, les corps se décomposaient. Pour conserver les corps, les
Egyptiens
décident donc de les déshydrater artificiellement, c'est la
momification.
Il faudra sans doute un millénaire pour qu'ils mettent au
point la technique de la momification. Au début de l'Ancien Empire (vers
2700 av JC) les premières momies apparaissent mais c'est seulement au
Nouvel Empire (vers 1500 av JC) que la technique de la momification est véritablement au
point.
On n'a retrouvé aucun texte égyptien traitant précisément de la
momification. Le seul texte écrit détaillé de l'époque est celui d'un
grec, Hérodote qui fit un voyage en Egypte au Vème siècle av JC. Extrait
:
"Tout d'abord à l'aide d'un crochet de
fer, ils retirent le cerveau par les narines ; ils en extraient une partie par
ce moyen, et le reste en injectant certaines drogues dans le crâne. Puis avec
une lame tranchante en pierre d'Ethiopie, ils font une incision le long du
flanc, retirent les viscères, nettoient l'abdomen et le purifient avec du vin de
palme et, de nouveau, avec des aromates broyés. Ensuite, ils remplissent le
ventre de myrrhe pure broyée, de cannelle et de toutes les substances
aromatiques qu'ils connaissent, sauf l'encens, et le recousent. Après quoi, ils
salent le corps en le couvrant de natron pendant septante jours ; ce temps ne
doit pas être dépassé. Les septante jours écoulés, ils lavent le corps et
l'enveloppent tout entier de bandes découpées dans un tissu de lin très fin et
enduites de la gomme dont les Égyptiens se servent d'ordinaire au lieu de colle.
Les parents reprennent ensuite le corps et font faire un sarcophage de bois,
taillé à l'image de la forme humaine, dans lequel ils le déposent ; et quand ils
ont fermé ce coffre, ils le conservent précieusement dans une chambre funéraire
où ils l'installent debout, dressé contre un mur".
Histoire, Livre II, 86.
Le décor du
sarcophage de Djedbastétiouefankh évoque aussi certaine opérations de
l'embaumement :
voir ici.
En s'appuyant sur
le texte d'Hérodote et sur les examens des momies, on peut retracer
les
principales étapes de la momification de première classe au Nouvel Empire :
- La famille du
mort fait appel aux embaumeurs et s'entend avec eux sur le type
d'embaumement à effectuer. Au début, les embaumeurs étaient rétribués par
des dons en nature, ils le seront également en argent à la Basse Epoque. L'embaumement de première classe est réservé
aux plus riches car il est très coûteux. Les embaumeurs sont des
prêtres, les observations anatomiques ne profiteront donc pas à la
médecine. L'embaumement est accompagné de récitations de prières, c'est
un acte religieux. Les embaumeurs forment une catégorie hiérarchisée : "le
contrôleur des mystères" et le "prêtre lecteur" ont la responsabilité
religieuse des opérations. Pour cela, ils ont à leur disposition des
livrets où sont consignées les opérations à suivre et les formules
magiques à réciter. Chaque phase de l'embaumement est assurée par des
spécialistes différents.
- Les embaumeurs
transportent en bateau le corps du défunt sur la rive ouest du Nil, lieu
de l'embaumement et du domaine des morts (l'occident : là où le soleil
"meurt" chaque soir).
Voir tombe de Menna.
Les embaumeurs s'installaient au départ dans les cimetières,
sous une tente qu'ils déplaçaient de tombe en tombe ou dans une structure
légère. Puis quand la momification se démocratise, ces structures
provisoires sont remplacées par des constructions permanentes en
briques. Les Egyptiens appellent ces lieux d'embaumement la Place pure (Ouabet)
ou la Belle Maison (Pernefer). Les lieux d'embaumement sont toujours
proches du Nil ou d'un canal d'irrigation car le lavement des corps
nécessite une grande quantité d'eau.
- On commence par
faire la toilette du mort : il est purifié (voir
une scène), lavé, rasé et épilé.
- Les opérations
de la momification proprement dite commencent quatre jour après la mort
et durent 70 jours, elles comprennent 5
phases :
1. Le cerveau est enlevé à l'aide d'un long crochet introduit
dans les narines. Il arrive aussi que le cerveau ne soit pas retiré par
le nez mais par l'occiput. Le cerveau n'est pas conservé car pour les Egyptiens c'est le
coeur qui est le siège de la pensée et des sentiments. Ensuite on remplit la boîte crânienne de natron*
pour dissoudre les restes du cerveau. Le crâne vidé, on le remplit d'un
mélange de résines** et d'huiles végétales parfumées. Il faut
chauffer ces composants pour les verser dans le crâne où ils se figent. Les
prêtres qui effectuent les opérations d'embaumement portent un
masque
d'Anubis.
*Le natron est une solution de soude naturelle que l'on
trouve en grande quantité dans les lacs salés et en bordure du désert.
**Les résines sont extraites des conifères et mélangées à de
la cire d'abeille
|
Coupe verticale d'un crâne momifié où l'on voit les résines
employées durant la momification et les tissus de lin qui
remplissent la cavité d'où l'on a retiré le cerveau.
Musée de la momie
Louxor |
|
Le masque d'Anubis porté par les prêtres embaumeurs
Terre cuite - Basse Epoque - H : 49.5 cm
Musée Römer-Pelizaeus, Hildesheim (Allemagne) |
2.
Les viscères sont retirés de l'abdomen
Les
paraschistes font une incision dans le flanc gauche de l'abdomen
avec un couteau en pierre d'Ethiopie (obsidienne) pour retirer les
viscères : les intestins, l'estomac, le foie, les poumons, le coeur.
L'abdomen après avoir été lavé avec du vin de palmier est rempli
de myrrhe pure, de cannelle et d'autres parfums. Le
coeur, siège de la
pensée selon les Egyptiens, est remis en place, après un traitement pour
sa conservation, car le défunt en a besoin pour le jugement dernier, si non, il est remplacé par une amulette en forme de scarabée. Les autres viscères,
soigneusement enveloppés dans des toiles de lin, sont conservés
dans 4 vases canopes* fermés par des bouchons.
A l'origine, ces vases avaient une forme humaine, puis à partir
de la XVIIIème dynastie, les bouchons qui les ferment sont à l'image des quatre Fils d'Horus,
génies protecteurs des viscères. Les quatre vases funéraires sont placés dans un
coffre en bois appelé aussi "canope" protégé le plus souvent par une
statue d'Anubis couché sur le couvercle.
Au Nouvel Empire, les bouchons des vases représentent le défunt lui-même
sous des traits idéalisés. On trouve également à cette époque des petits
cercueils à l'effigie des quatre fils d'Horus (voir ci-dessous, les canopes de Tchaouenhouy).
A la Basse Epoque, les viscères sont parfois replacés à l'intérieur même
du corps après traitement, enveloppés dans du tissu.
*Le mot "canope" semble être dû à une confusion commise par
les antiquaires du XIXème siècle. Ils auraient confondu ces urnes funéraires avec un vase gréco-romain
figurant Osiris sculpté dans la ville de Canope (delta du Nil). L'erreur
révélée, le mot serait cependant resté.
Les quatre Fils d'Horus - Musée de la momie - Louxor. |
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Amset
à tête humaine garde le foie |
Qebehsenouf
le faucon veille sur les intestins |
Hapi
le babouin est responsables des poumons |
Douamoutef
le chacal protège l’estomac |
Voir les canopes du Louvre. |
|
Canopes de Tchaouenhouy sous forme de cercueils avec la tête à
l'image des quatre fils d'Horus.
Musée du Louvre. |
Les quatre vases canopes enfermés dans leur coffre appelé également
"canope".
Musée du Louvre. |
Cercueil à viscères. Entoilé, enduit et doré, incrusté de pierres
(la tête) et de verre de couleur. XVIII° dynastie.
Musée du Louvre. |
Hérodote parle aussi d'une autre méthode plus simple pour vider le
corps de ses viscères : le corps n'est pas ouvert mais reçoit un
lavement d'huile de cèdre qui dissout les intestins.
3. Le corps est
déshydraté. Le corps
débarrassé de ses éléments putrescibles, il faut maintenant le
déshydrater. Pour cela, les taricheutes placent à l'intérieur des linges
contenant du natron et des aromates. Tout le corps est aussi recouvert
de natron sec pendant 40 jours. La déshydratation est favorisée par la
sécheresse du climat, le corps étant exposé au soleil dans une cuve.
La poudre de natron (carbonate de soude) est utilisée à partir du Moyen
Empire, auparavant on utilisait le bain de natron (silicate de soude)
moins efficace. La poudre de natron qui recouvrait le cadavre pouvait
atteindre plusieurs fois le volume du corps.
4. La cavité
abdominale est bourrée de tissus. La
déshydratation terminée, les prêtres lavent le corps, le frottent avec
de la myrrhe*, assouplissent la peau avec des onguents** (huiles et
résines), puis, pour lui redonner les formes de la vie, ils bourrent
la cavité abdominale de tissus (tampons de lin imprégnés de résine
et d'aromates) et parfois de sciure de bois. Puis le corps est recousu.
* La myrrhe : gomme résine aromatique produite par un arbre.
** Les onguents ont pour but de protéger le corps des bactéries et des
champignons.
|
La plaie d'éviscération était une atteinte à l'intégrité du corps.
Pour protéger cette blessure qui ne cicatriserait jamais on
utilisait une
plaque aux vertus prophylactiques. La plaque était le plus souvent
en cire mais on en a retrouvé deux en or, celle du roi Psousennès et
celle de sa mère Hénouttaouy (photo ci-contre). La plaque était
cousue sur les bandelettes (voir les 4 trous aux coins). Au centre,
l'oeil oudjat est un symbole de plénitude cosmique et d'intégrité. De chaque côté,
se tiennent les 4 fils d'Horus (leur nom est inscrit au-dessus de
leur tête). Le texte en dessous identifie la défunte. |
Les yeux étaient parfois retirés pour être remplacés par des prothèses.
Il arrivait aussi qu'on colore la peau avec de l'ocre rouge pour les
hommes et de l'ocre jaune pour les femmes.
5. Le corps est emmailloté dans des bandelettes. La dernière opération qui dure 15 jours est le bandelettage.
Là encore, le travail est effectué en prononçant les formules sacrées
usuelles.
Les embaumeurs enveloppent chaque membre par des bandelettes de lin fin
imprégnées de gomme. On commence pas les extrémités des membres. Pour
les plus riches, les doigts des mains et des pieds, particulièrement fragiles, sont protégés
par des doigtiers en or ou en argent. Durant la pose des bandelettes, on
dispose les amulettes* protectrices et magiques à divers
endroits du corps définis par le rituel de l'embaumement. L'emmaillotage
terminé (il y a souvent 7 couches de bandelettes successives qui peuvent
représenter 375 m2 de lin**) le corps est enveloppé dans un ou
plusieurs grands linceuls. Enfin, on dépose un masque funéraire sur la
tête de la momie. Ce masque est en papier mâché pour les plus pauvres et
en or pour les plus riches, il prend une forme divinisée avec une
physionomie idéalisée sans rapport avec les traits du défunt.
*Les amulettes sont en faïence ou en métal précieux, les
scarabées qui favorisent la renaissance du défunt sont indispensables.
Les bijoux du mort et les vases à
onguents ont la même fonction magique et prophylactique que les amulettes.
Toutankhamon était protégé par une centaine d'amulettes.
** On n'utilisait pas toujours du lin neuf, un chant de lamentation dit
: "celui qui avait du lin si fin... dort maintenant dans des vêtements
d'hier mis au rebut".
La momification elle-même est maintenant terminée, le défunt est prêt à
être inhumé 70 jours après sa mort. On s'est cependant aperçu que l'on
pouvait aujourd'hui réaliser, avec les même techniques, une momification
en 35 jours. Pourquoi un tel décalage? Les Egyptiens avaient une grande
vénération pour l'étoile Sirius, c'est elle qui annonçait la crue du
Nil. Cette étoile, à cette époque, disparaissait et réapparaissait au
bout de 70 jours, ils en déduisirent que, dans le monde céleste, entre
la mort et la renaissance le temps était de 70 jours et qu'il fallait
appliquer cette durée pour l'embaumement qui permettait au défunt de
renaître, de devenir un nouvel Osiris.
La momie est ensuite placée dans un ou plusieurs sarcophages (cercueils
en bois peint, d'abord rectangulaire, puis de forme humaine, et parfois
en or pour les pharaons) qui s'emboîtent les uns dans les autres.
Voir
pour Toutankhamon
On
n'oublie pas de déposer le
Livre des Morts qui contient toutes les
formules magiques pour que le défunt triomphe de tous les dangers qui
l'attendent dans le monde souterrain d'Osiris. Sa première épreuve sera
de passer avec succès le
jugement
d'Osiris.
|
La momie dans son sarcophage à forme humaine. Remarquez les
amulettes protectrices cousues sur le linceul (notamment le scarabée
à la place du coeur).
Musée de Louxor
|
Sarcophage de forme humaine (partie inférieure et couvercle).
Cliquez sur les miniatures pour voir la décoration intérieure du
sarcophage (peintures remarquables).
Sarcophage de Padi-Amon, père divin de Amon-Rê, XXIème dynastie -
Deir el-Bahari - Musée de la momie Louxor. |
|
Partie supérieure de sarcophage (couvercle) : exemple de décoration
symbolique.
Sarcophage de
Maséharti, grand prêtre d'Amon Rê et général de l'armée. XXIème
dynastie - Deir el-Bahari - Musée de la momie Louxor.
Cliquez sur la
photo pour agrandissement et accéder à la description
|
En savoir plus sur les sarcophages
Avant l'inhumation proprement dite, la coutume s'établit chez les
personnages de haut rang d'envoyer la momie du défunt visiter
la ville d'Abydos où se trouve le sanctuaire principal du dieu
Osiris. La momie est alors
transportée en bateau, couchée sur le pont, enveloppée de linges brodés.
Les prêtres récitent des prières et font des fumigations d'encens
pendant le voyage. Les parents et les proches suivent dans un second
bateau. A Abydos, la momie participe aux offrandes à Osiris puis elle
retourne en paix au pays natal si elle n'est pas inhumée dans la ville
d'Osiris. Plus tard, on s'affranchira de la réalité du voyage en le
peignant sur les parois de la tombe ou simplement sur le sarcophage.
Voir la tombe de Menna
La momie est ensuite prête à être inhumée, elle est confié
aux nécrotaphes qui vont s'occuper de son transport (il faudra encore
traverser le Nil) et de
l'inhumation.
|
Bateaux funéraires transportant la momie sur la rive Ouest du Nil. Ces
bateaux en modèle réduit sont déposés dans le tombes (ou peints sur
les murs) pour que le mort puisse faire ses pèlerinages, notamment
celui d'Abydos. |
Les funérailles
Arrivée sur la rive Ouest du Nil, la momie est placée dans un coffre sur une barque elle-même posée sur un
traîneau ou un chariot à roues à l'époque ptolémaïque. Le chariot est
tiré sur le sable du désert par des hommes ou par des vaches. Le cortège funèbre se dirige vers
la tombe. Il est composé des membres de la famille qui tiennent le
cordon du catafalque (voir
pour Toutankhamon), des amis et serviteurs qui transportent le
mobilier funéraire et les offrandes (voir
tombe de Ramose), des pleureuses professionnelles qui
se couvrent la tête de poussière et se frappent la poitrine en poussant
des cris pour montrer leur douleur (voir
pour Ramose), des prêtres (appelés coachytes à la
Basse Epoque) qui dirigent la cérémonie des funérailles, encensent le
corps, récitent des formules magiques (le supérieur des mystères est
vêtu d'une peau de léopard, les autres prêtres sont habillés de blanc,
couleur du deuil). Deux femmes
personnifient Isis et Nephtys qui
veillent sur le corps (elles rappellent leur rôle éminent dans la
confection de la première momie : Osiris).
Voir le cortège de Ramose.
Cortège funèbre : papyrus du Livre des Morts de Maiherpéri - XVIIème
dynastie - Musée du Caire
La momie repose sur un lit posé dans une chasse ouverte, elle-même
placée dans la barque funéraire installée sur le traîneau tiré par
des boeufs. De part et d'autre de la chasse,
Isis et Nephtys protègent le défunt. |
Quand le cortège est arrivé devant la tombe,
la momie est ôtée du cercueil et dressée, soutenue par un
prêtre-embaumeur portant un masque à l'effigie d'Anubis. Le fils aîné ou le
supérieur des mystères procède alors au rituel de l'ouverture de la bouche (voir
pour Toutankhamon). A l'aide de l'herminette, tout en prononçant les
formules rituelles, il touche les sept ouvertures de la tête pour
redonner vie à la momie. En effet, la momie a besoin de respirer, voir,
parler, entendre pour éviter les embûches du monde des morts et
s'alimenter des offrandes funéraires déposées dans la tombe.
|
Sur les peintures murales des tombes, on voit souvent la scène de l'ouverture de
la bouche pratiquée par Anubis, le dieu des embaumeurs.
Tombe de Nebenmâat (Deir el-Médineh)
|
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Herminette ou Sétep servant à pratiquer l'ouverture de la bouche
pour redonner toute sa vitalité au défunt. Musée de la momie Louxor.
Provenance : Deir el-Bahari. |
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Herminette gravé au nom de la reine Hatshepsout. La lame en bronze
est fixée à un manche en bois à l'aide de lanières de cuire.
Provenance : Deir el-Bahari.
Musée du Louvre. |
|
On procède aussi à la libation de l'eau, les prêtres récitent les
formules appropriées, font des fumigations à l'aide d'un encensoir,
touchent le sarcophage à l'aide d'accessoires regroupés sur une
plaque de bois évidé, véritable trousse à outils.
Instruments utilisés par les prêtres lors de la cérémonie de
l'ouverture de la bouche. Musée de Leipzig. |
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Libation de l'eau (ou lustration) : Thot et Horus purifient le
défunt devenu bienheureux : la nudité signifie la régénération et la
jeunesse éternelle.
Détail d'un sarcophage provenant de Touna-el-Gebel - Vers 150 ap JC
- Musée du Louvre.
Pour voir le
sarcophage en entier |
Dès ce moment, la momie a accès à la vie
éternelle si son ka passe avec succès le
jugement
d'Osiris.
La momie est replacée dans son cercueil qui est alors descendu dans la tombe et déposé dans une cuve en
pierre qui sera scellée par un couvercle au poids énorme. La cuve est
elle-même renfermée dans des chapelle en bois emboîtées si on se réfère
à la tombe de Toutankhamon (voir
pour Toutankhamon). Les vases canopes sont déposés près de la
momie, enfermées également dans une chapelle appelée aussi "canope".
Les porteurs d'offrandes descendent dans la tombe les fleurs, le
mobilier et les victuailles nécessaires à la nouvelle vie du mort (un
boeuf a été immolé). Les offrandes doivent restituer les force vitales
du défunt (le ka).
|
Serviteur portant les offrandes : fruits, raisins, natte et bouquet
de papyrus.
Le texte précise "Présentation des offrandes destinées au scribe
Nakht".
Tombe de Nakht (N° 52) à Thèbes. XVIIIème dynastie - vers 1420 av
JC. |
Parmi le mobilier, on dépose un bateau en miniature qui peut prendre
plusieurs fonctions :
- les morts ont besoin d'un bateau pour traverser le Nil afin de
rejoindre les nécropoles du monde des morts situées sur la rive Ouest
(voir plus haut).
- le pharaon doit avoir un bateau pour traverser le ciel en compagnie du
soleil
- le défunt est appelé à se déplacer dans le monde souterrain d'Osiris ;
pour cela, il a besoin d'une barque
- la momie ou
la statue du défunt
devait effectuer un pèlerinage rituel en Abydos avant l'inhumation
Voir tombe de Menna
Voir pour Toutankhamon
Avant de quitter la tombe, la femme du défunt prononce l'adieu au mort.
La cérémonie terminée, la tombe est soigneusement murée, on y appose des
sceaux afin de constater si nécessaire son inviolabilité. Toutes ces
précautions n'empêcheront jamais les pilleurs de tombe de s'emparer de
toutes les richesses déposées dans ces maisons d'éternité.
La journée des funérailles se termine par un banquet présidé, en
effigie, par le mort. Les invités se restaurent avec les animaux
sacrifiés pour la cérémonie. Quand ils auront terminé, ils retourneront
de l'autre côté du Nil, sur la rive est, du côté des vivants.
La momification pour les moins riches
Selon Hérodote :
"Pour
ceux qui préfèrent l’embaumement moyen et veulent éviter de grandes
dépenses, les embaumeurs font les préparatoires suivants. Après avoir
rempli leur seringues d’huile de cèdre, ils injectent cette huile dans
l’abdomen du mort, sans l’ouvrir, ni en retirer les entrailles, et ils
ont soin de retenir le liquide de telle sort qu’il ne puisse s’échapper.
Ensuite, ils plongent le corps dans du natron et l’y laissent le temps
prescrit, puis ils font sortir des cavités l’huile de cèdre. Elle a
assez de force pour tout emporter avec elle, intestins et viscères ;
elle a tout liquéfié. Extérieurement le natron a desséché les chairs, il
ne reste du mort que la peau et les os. Ces choses faites, ils le
rendent en cet état".
HISTOIRES, II, 88
La momification
des animaux :
Les animaux sont
sacrés dans l'Egypte ancienne et à ce titre, ils ont droit à la
momification tout comme les humains. On a retrouvé par exemple des
centaines de milliers de chats momifiés,
des crocodiles, des taureaux (voir
Apis), des oiseaux, des poissons, des béliers, des chiens, des
babouins, des ibis... A Lyon, au musée Guimet d'histoire naturelle, se trouve la
plus grande collection de momies d'animaux en Europe, il y a même un
sarcophage de ver de terre! Dans une momie de crocodile, sous les
bandelettes, à l'aide des rayons X, on a vu des dizaines de bébés
crocodiles sortant de leur oeuf.
Les animaux momifiés sont enterrés dans des nécropoles par espèce :
cimetières de chats (pour honorer la déesse Bastet), d'ibis (pour le
dieu Thot), de taureaux Apis (enterrés dans un vaste hypogée collectif :
le
Serapeum de Saqqarah).
Hérodote fait état de tensions entre populations car certaines
communautés sacrifiaient, voire mangeaient, les espèces que d'autres
vénéraient.
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