Les portraits du fayoum

LA RELIGION

LE SARCOPHAGE - Page 11/11

LES  PORTRAITS ENIGMATIQUES  DU  FAYOUM (époque romaine)

LA DECOUVERTE
A la fin des années 1880*, de mystérieux portraits commencèrent à arriver aux Etats-Unis et en Europe occidentale. Ces belles peintures venaient d'Egypte, plus spécialement du Fayoum, une région fertile située
à l'ouest du Nil, à 60 kilomètres au sud du Caire. La première série de portraits fut trouvée par des paysans en 1887 à el-Roubayat (collection Graf), aux confins du désert, sur les hauteurs qui sont à l'abri des crues du fleuve. D'autres découvertes (la plupart clandestines) suivirent : celles de W. Flinders Petrie à Hawara (les seules fouilles scientifiques), celles de B. Grenfell et A. Hunt à Tebtounis, celles d'A. Gayet à Antinopolis, en Moyenne-Egypte. Aujourd'hui, plus d'un millier de panneaux sont connus, avec sans doute un certain nombre de faux. Les dernières découvertes se situent à el-Hibe, près de Thèbes et à el-Alamein, sur la méditerranée.
* En réalité les premières momies à portraits furent découvertes à Memphis et rapportées au XVIIème siècle en Europe par Pietro Della Valle, un noble Italien qui parcourut l'Egypte pendant onze mois. Il s'arrêta à Saqqarah pour acheter une momie et la ramener à Rome. Là, il trouva un paysan qui lui proposa de lui vendre une momie. Dans le puits découvert par le paysan, Pietro Della Valle trouva les deux premières momies à portrait mais elles passèrent pratiquement inaperçues.
HISTORIQUE
Dans l'Egypte qu'ils avaient conquise, les Grecs empruntèrent aux Egyptiens leurs rites funéraires et momifièrent leurs morts. Quand les Romains prirent la place des Grecs, certains se firent également momifier. Les portraits du Fayoum concernent donc des Romains momifiés en Egypte mais avec une particularité : le visage des momies était soit recouvert d'un mince panneau de bois, soit d'un linceul en lin sur lequel était peint le portrait du défunt. Parfois le portrait était inséré dans les bandelettes. Cette pratique funéraire prend ses origines dans la longue tradition du sarcophage anthropomorphe* en y ajoutant le goût spécifiquement romain pour le portrait et le réalisme que les conquérants tenaient des Grecs. En effet, si  les hommes et les femmes représentés ont des vêtements, des parures, des bijoux romains, les artistes qui les ont peints demeurent fidèles à la tradition picturale grecque de l'école d'Alexandrie
(technique naturaliste établie par le grand peintre grec du IVème siècle av. JC, Apelle).
*
Les portraits remplacent le masque tridimensionnel égyptien
LA TECHNIQUE
Nous avons vu que les portraits sont réalisés sur deux types de support : le bois* et la toile de lin. De même, ils peuvent être peints selon deux techniques :
- la peinture à la détrempe (la tempera) qui utilise des pigments mêlés à une colle soluble dans l'eau (41% des portraits)
- la peinture à l'encaustique où l'on applique à chaud une couleur délayée dans de la cire fondue (59% des portraits)
Les portraits sont en général un peu plus petits que la taille réelle du modèle.
En plus de l’or (résurgence des masques égyptiens), les peintres ont utilisé quatre couleurs : le noir, le rouge et deux ocres. Des rehauts modèlent la carnation (pommette, paupière...). En général, les yeux sont très grands presque disproportionnés, ils fixent le spectateur et ne sourient pas.
Les portraits étaient posés directement sur le visage du mort, on enveloppait ensuite le corps de bandelettes suivant un motif complexe en caissons en prenant soin, la plupart du temps, de ne pas emmailloter le portrait du défunt. Les pillards purent ainsi facilement découper directement les portraits sur les momies, ce qui priva les égyptologues du contexte archéologique. En effet, la plupart des portraits, à cause des fouilles sauvages, nous sont parvenus sans la momie.

* Les bois les plus utilisés sont le tilleul et le figuier sycomore (le meilleur car il travaille peu). Le cyprès, le cèdre, le sapin et le pin sont également utilisés.
Ces deux techniques et les deux types de support n'ont rien à voir avec la chronologie.
LE PROBLEME DU MODELE
Il faut se poser aussi la question du moment de la réalisation de ces portraits dont les visages sont si émouvants. Le portrait a-t-il été effectué du vivant du modèle ou à titre posthume? La réponse n'est pas tranchée.
Certains pensent qu'en règle générale les portraits ont été peints du vivant des personnes représentées par des peintres ambulants. Les portraits
furent décrochés de leur cadre pour être incorporés à la momie au moment de la mort. Le portrait changeait de statut à ce moment-là et devenait un objet de vénération : le substitut immortel du défunt. Les preuves avancées sont de plusieurs ordres :

- les visages sont peints avec des expressions de vie si saisissantes qu'il apparaît impossible que même un peintre génial puisse animer un tel regard en prenant pour modèle un visage éteint.
- les portraits, trop grands, ont été découpés du support originel pour les adapter à la momie : ce découpage est le plus souvent peu soigné (tâche effectuée à la sauvette par les embaumeurs peu qualifiés pour ce genre de travail) alors que la peinture est très soignée.
- un portrait avec son cadre d'origine a été trouvé par Petrie
Reste aussi à savoir si ces portraits étaient peints du vivant de leur modèle dans le but premier de les utiliser au moment venu pour la momie ou dans un but décoratif domestique immédiat.
Mais on est sûr aussi que d'
autres portraits ont été peints à titre posthume, surtout quand la mort était soudaine, cas des enfants en particulier. Certains examens radiologiques ont d'ailleurs révélé d'importantes convergences entre l'âge du défunt et celui de son portrait. Si la plupart des personnes sont jeunes sur les portraits, ce serait dû uniquement à l'espérance de vie qui était très courte à cette époque, à moins que les peintres aient choisi de représenter leurs modèles à un âge "idéal". On connaît le cas d'un homme qui apparaît avoir quarante ans sur son portrait (ce qui n'est pas l'âge "idéal") et dont la radiographie de la momie est évaluée à 80 ans. De même, le  Demetrios de l'Art Museum de Brooklyn semble avoir 45 environ, alors que l'inscription tracée sur le premier linceul nous apprend qu'il quitta la vie à l'âge de 89 ans.
PS : pour Gayet, tous les portraits ont été achetés à des peintres ou a des marchands qui proposaient à leurs clients un échantillonnage de races, de types, d'âges, de costumes, de coiffures, de bijoux, il ne restait donc qu'à choisir dans la série celui qui ressemblait le plus
au défunt.
LE LIEU DE CONSERVATION
Etrangement, quand on découvrit ces momies, on constata qu'elles étaient entassées dans des tombes communes, comme si on avait voulu s'en débarrasser, plutôt que les honorer. Sur leur bois, on pouvait voir les marques qu'avaient laissées des traces de balais, ou sur leurs pieds, des graffiti que des enfants s'étaient amusés à inscrire. En fait, ces momies avaient partagé le quotidien des vivants qui les gardaient dans leur maison (dans la chambre des ancêtres?) tant qu'ils étaient attachés aux défunts représentés. Généralement, au bout de deux générations les  momies étaient retirées, remplacées par d'autres représentant des morts plus chers. La coutume de conserver les morts dans les maisons se maintint dans l'Egypte christianisée. Lorsqu'en 392, l'Empereur Théodose promulgua un édit interdisant cet usage païen, les habitants du Fayoum durent tous sortirent leurs morts des maisons et les enterrer dans de grandes tombes collectives.
QUI ETAIENT CES ROMAINS MOMIFIÉS?
Ces portraits sont généralement ceux des nouveaux colons romains, les centurions et leurs familles en garnison en Egypte.
Les Romains avaient les moyens de se payer cette momification coûteuse, ils représentaient la minorité riche et privilégiée par rapport aux indigènes et aux Grecs. On y trouve aussi des enseignants, de simples soldats, des athlètes, des prêtres de Sérapis, des marchands, des fleuristes. Il arrive même que nous sachions leurs noms : Aline, Flavien, Isarous, Claudine... Tous ces citoyens romains avaient choisi la voie égyptienne pour aborder l'au-delà, ils pensaient accéder à la vie éternelle en devenant un nouvel Osiris (but atteint par les portraits qui ont immortalisé tous ces Romains).
COMMENT SE FONT-ILS PEINDRE?
Il n'y a pas de règle générale, les portraits sont divers et variés par la pose adoptée (de face ou de trois-quarts, contrairement aux Egyptiens qui ne sont représentés que de profil) et la qualité de l'artiste : certains portraits sont très raffinés et sont de véritables chefs-d'oeuvre, d'autres sont de qualité artistique moindre. Mais tous les portraits devaient être ressemblants, c'était nécessaire pour que l'âme, après la mort, puisse retrouver facilement son corps d'origine. Ces Romains se faisaient peindre selon la mode en vigueur* dans l'Empire : bijoux, coiffures, forme de la barbe, coupe des vêtements ajoutent à la variété et contribuent à dater précisément les portraits. Parmi les personnages représentés, certains possèdent des traits nettement africains, ce qui montre qui si les mariages mixtes n'étaient pas encouragés, ils n'étaient cependant pas rares.

* avec un certain décalage temporel compte tenu de l'éloignement de Rome
POURQUOI LE PORTRAIT SUR LA MOMIE
?
Dans la mesure où la position adoptée des personnages est la même que celle d'une photo d'identité, on peut penser que le portrait servait à identifier précisément la momie, même si les inscriptions jouaient déjà ce rôle. Le portrait était une mesure supplémentaire de ne pas tomber dans l'oubli, d'éviter de disparaître une nouvelle fois. Le portrait est aussi une survivance, sous une nouvelle forme, du masque funéraire déposé sur la momie avec l'avantage de la ressemblance afin que l'âme, après la mort, puisse retrouver facilement son corps d'origine.
DE QUAND DATENT LES PORTRAITS?
La datation des portraits de momie a toujours été un sujet très controversé. Quand les portraits arrivèrent en grand nombre en 1887 leur excellent état de conservation éveilla des doutes quant à leur authenticité. Mais la campagne de fouilles scientifiques menée par W. M. Flinders Petrie confirma leur authenticité.
- Graf pensait que les portraits étaient hellénistiques  et que certains d'entre eux concernaient même des membres de la dynastie des Ptolémées.
- Ebers qui épousait ces vues data les portraits entre 200 et 80 av JC.
- Grault contesta cette thèse et avança que les portraits concernaient des Romains et non des Grecs, il les data des IIèmes et IIIèmes siècles ap JC.
- Petrie peu après, classa les momies qu'il avait découvertes en quatre catégories qui s'étaient succédé chronologiquement et conclut que les portraits ne pouvaient pas être antérieurs avant 100 ap JC. Il eut le mérite d'être le premier à prendre en considération pour une datation précise, le style des coiffures, barbes et bijoux.
- Mais C.C. Edgar récusa la thèse chronologique de Petrie ainsi que le début de la datation des portraits (100 ap JC), il confirma cependant que tous les portraits étaient antérieurs au milieu du IIIème siècle ap JC.
- En 1922, Paul Bubert data les portraits du Ier au IIIème siècle ap JC.
- Heinrich Drerup en comparant les portraits aux sculptures romaines allongea la datation : du premier quart du Ier siècle au milieu du IVème siècle ap JC.
- En 1969, Klaus Parlasca propose une datation pour chaque portrait en se fondant sur la coiffure et le style de la peinture.
- Mais Hans Jucker montra que Parlasca avait daté des portraits du IVème siècle alors qu'ils datent du IIème siècle : l'erreur s'explique par le fait qu'au IVème siècle, il y a un retour de la mode des coiffures du IIème siècle.
Aujourd'hui, en prenant les coiffures comme critère, on arrive aux conclusions suivantes : les premier portraits furent peints à l'époque de Tibère (14-37 ap JC) et les derniers au milieu du IIIème siècle ap JC.
IMPORTANCE DES PORTRAITS
Ces portraits sont importants à plusieurs titres :
- Ce sont les premiers portraits peints connus dans l'histoire de l'art mondial
- Ils sont une source d'information historique sans pareille
- Ils sont à la rencontre de trois cultures : égyptienne, grecque et romaine, ils montrent le mélange des trois religions et l'attrait des Romains pour les religions orientales
- Ils ont immortalisé des hommes et femmes romains en quête de l'au-delà à une époque où l'on écrit les évangiles et il faut bien admettre que les icônes byzantines représentant le christ pantocrator (qui exalte la vie éternelle) sont bien proches des portraits du Fayoum.

RÉSUMÉ
Les portraits du Fayoum ont été découverts dans leur grande majorité à la fin du XVIIIème siècle, mais pas seulement au Fayoum. Ils sont peints sur du bois ou sur une toile de lin (linceul) en utilisant soit la technique de l'encaustique, soit celle de la détrempe. Ces momies concernent des Romains qui occupaient alors l'Egypte (la classe privilégiée) et elles étaient conservées dans les maisons. Le style de la peinture est le réalisme des peintres grecs de l'école d'Alexandrie. La datation des portraits s'étale entre le Ier siècle ap JC et le milieu du IIIème siècle avec un épanouissement au IIème siècle. La majorité des portraits ont dû être peints du vivant de leur modèle. Ce sont les premiers portraits peints connus du monde.

EXEMPLES  DE  PORTRAITS

Momie à portrait d'Eudaimôn. IIème siècle ap JC. Antinoé? Bois peint à l'encaustique, toile de lin. Musée du Louvre.
Cette momie à portrait complète permet de bien comprendre comment était fixé le portrait sur la momie à l'époque de la domination romaine.
Ici la défunte est immortalisée à la fois par son embaumement, son portrait et l'inscription en grec qui la nomme : "Bonne chance Eudaimôn". Le savant assemblage des bandelettes, en losanges emboîtés et de couleur différente, date de l'époque romaine. Il reproduit le motif de la résille en lui conférant une dimension architecturale. L'encolure de la robe du portrait est entourée d'un galon à motif de triangles.

Portrait de jeune femme à l'encaustique sur bois. 42 cm x 23 cm - vers 138-161 - Provenance : Hawara.
Musée du Caire.
La pose, avec la tête à peine tournée vers la gauche, alors que le buste est davantage figuré de trois quarts - montre la maîtrise technique du peintre. La partie au centre du visage qui n'était pas couverte de bandelettes est plus pâle. Les cheveux, séparés par une raie médiane, sont coiffés en délicates ondulations et maintenus sur la nuque par un chignon. L'expression est profondément mélancolique. Les boucles d'oreilles sont formées de deux perles montées sur une baguette d'or, le collier en émeraude n'est pas peint en vert mais en gris pour l'harmonie avec l'ensemble des autres couleurs. Elle porte un chiton violacé qui se déploie sur la poitrine en plis multiples.

Portrait de soldat à l'encaustique sur bois. 41 cm x 20 cm - vers 110-130 - Provenance : el-Roubayat - (collection Graf). Vorderasiatisches Musum - Berlin.
Le soldat porte un uniforme composé :
- d'un manteau (le sagum) tenu par une épingle en or sur une épaule et drapé autour de l'autre
- d'un baudrier (le balteus) en cuir avec des clous en métal doré.
Les cheveux et la barbe sont courts, la couronne d'or symbolise sans doute une victoire.
La bande rouge autour du cou pourrait être un collier. Des traces de bitume provenant des bandelettes marquent par endroits la toile.

Portrait d'Isidora à l'encaustique sur bois. 33.6 cm x 17.2 cm - vers 130-161 - Provenance : el-Hibe?
Malibu (Californie) The J. Paul Getty Museum.
Le panneau de bois, en excellent état, est parvenu jusqu'à nous avec une bonne partie du sarcophage osiriforme ce qui en accroît l'intérêt. Une inscription en caractères grecs sur le linceul, à gauche, donne le nom de la défunte "Isidora" (une grande dame de l'aristocratie romaine). Une partie du buste (la tunique violacée avec des bandes) est peint directement sur le linceul rouge orné de losanges dorés. La femme porte une couronne en feuille d'or avec un motif central caractéristique (mais à la signification inconnue) ainsi qu'une grande épingle en or dans une coiffure très élaborée et typique de la période des Antonins. Les bijoux sont riches et variés : un collier d'or et d'émeraudes à trois rangées muni d'un cabochon mauve de la couleur des vêtements, des boucles d'oreille ornées de quatre perles en pendeloque (au lieu de trois ordinairement). La disposition de la couleur, les effets d'ombre et de lumière sont rendus avec beaucoup de naturalisme. L'artiste qui a réalisé ce portrait était sans nul doute un maître de la technique du portrait à l'encaustique.
Portrait d'homme à l'encaustique sur bois. 30 cm x 17.5 cm - vers 161-180 - Provenance : el-Hibe
Cambridge, Fitzwilliam Museum.

Comme le p
ortrait précédent, le panneau de bois est posé sur un linceul rouge orné de losanges dorés, mais ici la momie est complète. Sur le linceul, on peut notamment distinguer Anubis s'occupant le la momie allongée sur un lit funéraire.
Le visage se distingue par des sourcils très fournis en forme de V, de lourdes paupières, des yeux injectés de sang. Les cheveux et la barbe sont bouclés.
 

Portrait de femme à la détrempe sur lin (fragment d'un linceul). 64 cm x 38 cm - vers 193-235 - Provenance : Antinooupolis - Athènes, musée Bénaki.
Cette femme était certainement représentée en pied, mais seule la partie supérieure du corps subsiste. Elle a pour vêtements une tunique à manches et un châle court à franges. Elle porte des boucles d'oreille serties de perles et deux bagues en or avec des pierres. Le collier est en forme de torque modelé en stuc doré. La femme tient dans la main gauche une lourde croix ansée (signe de vie éternelle).
Les linceuls d'Antinooupolis comportent des éléments énigmatiques :
- quelle est la signification de la main droite levée? signe de bénédiction, de prière, de refus du mal?
- la croix ansée présente une tête sphérique qui fait penser aux lettres grecques formant le monogramme du Christ.
En sachant qu'Antinooupolis fut un foyer du christianisme naissant et que ce même geste (mais inversé) se retrouvera dans les icônes grecques, pourrait-il s'agir d'un syncrétisme de croyances? Une transition entre la religion égyptienne et le christianisme?

Portrait de femme à la détrempe sur bois. 35 cm x 19.5 cm - vers 161-180 - Provenance : el-Roubayat
Musée du Caire. Le panneau est épais et il manque un fragment sur la droite.
Ce portrait s'éloigne de la tradition gréco-romaine et préfigure l'art byzantin. Il nous interpelle aussi par sa modernité et préfigure Modigliani, Picasso et Matisse.
La femme est vêtue simplement et porte de discrètes boucles d'oreilles, son expression est douce. Sa chevelure ondulée, rendue par de fines lignes blanches, couvre presque ses oreilles. Le nez est long et étroit, les sourcils sont sombres et épais.

Portrait de "Tondo des deux frères", peinture à l'encaustique sur bois- diamètre 61 cm - IIème siècle ap JC - Provenance : Antinooupolis - Musée du Caire.
La tradition identifie ces deux personnages comme des frères morts en même temps. Les deux hommes se ressemblent, mais comme les visages portent aussi de nettes différences, on pense que leurs parents étaient d'origine différente (romaine, égyptienne ou grecque). C'est le seul portrait à porter une date, sans que l'on sache s'il s'agit vraiment de la date de la mort des frères (l'inscription "pakhon"  renvoie au 9ème mois du calendrier égyptien, ce qui correspond au 10 mai dans le calendrier julien).
Celui de gauche semble être le plus jeune, il devait avoir entre 15 et 17 ans. Il porte une tunique (le chiton) blanche bordée de rouge à l'encolure. Sur l'épaule gauche, on voit distinctement la svastika (une croix gammée, symbole romain de vie éternelle) en broderie. Le manteau rouge (la chlamyde) est fixé à l'épaule droite par une broche en or à cabochon vert. Ses lèvres entrouvertes dessinent un sourire triste.
Celui de droite est de teint plus mat avec un nez large et des lèvres charnues. Sa bouche est très expressive et donne un caractère triste au portrait. Les cheveux sont noirs et bouclés, la moustache est naissante. Il porte une tunique blanche et un manteau de la même couleur. La bande pourpre sur l'épaule gauche est sans doute un clavus (
bande verticale décorant la tunique romaine et représentée sur la tunique du Christ, des Anges et des apôtres).
Au-dessus de l'épaule extérieure de chaque homme, se trouve une statuette en or. Celle de droite
représente Hermès (identifié à Anubis) ou Hermanubis Psychopompe, reconnaissable au caducée qu'il tient dans sa main droite, tombant le long du corps, celle de gauche figure Osirantinoüs. Les deux représentations ont une connotation funéraire, ce qui prouverait que les deux frères sont morts ensemble. On pense que les portraits ont été peints du vivant des modèles, s'ils ont été exécutés à titre posthume, ils ont pu l'être à l'aide de copies existantes. Il se pourrait aussi que les divinités funéraires et la date aient été ajoutées au moment de la mort. Tout indique que ces deux personnages appartenaient à une famille de haut rang, sans doute patricienne.

Portrait d'enfant à l'encaustique sur bois. 35.5 cm x 16.5 cm - vers fin du Ier siècle début du IIème - Provenance : Fayoum - Musée du Caire.
L'enfant a de grand yeux bordés de cils très longs, esquissant un vague sourire. Une lumière radieuse traverse son visage tandis qu'une ombre projetée sur le regard innocent apparaît comme un présage de sa fin précoce. La couronne dans les cheveux symbolise tout à la fois la jeunesse, les qualités athlétiques et les nobles origines du défunt (attestées aussi par la tunique et le manteau blancs). Dans le cas d'un enfant, il est difficile d'imaginer que le portrait ait été effectué du vivant du modèle.

Londres
(B-M)

Le Caire
 


 
Ces deux momies complètes permettent d'apprécier le cartonnage des cercueils somptueusement ornés de feuilles d'or.
Sur la momie du jeune homme (environ 20 ans), on peut voir les divinités traditionnelles égyptiennes : Anubis debout derrière la momie sur son lit funéraire avec Isis et Nephtys à ses côtés, Horus et Thot, on peut lire aussi une inscription en grec "Artémidôros, bon courage!".
La momie de la femme renferme en fait une jeune fille de 7 à 10 ans (compte tenu de la longueur de la momie et des bras modelés sur la momie qui sont ceux d'une enfant tenant dans ses mains une guirlande et du blé). Le cartonnage est entièrement doré et incrusté de pierres et de pâtes de verre coloré. Les bijoux sont nombreux et particulièrement élaborés. La jeune fille est associée à Isis par la mèche d'Isis et à Aphrodite par son épaule dénudée. Le fond doré donne au portrait une forte ressemblance avec les icônes. La profusion des dorures a donné à la momie le nom de "jeune fille dorée".

Portrait de femme dite "Zénobia" à la détrempe sur bois. 33.5 cm x 20.5 cm - vers 138-161 - Provenance : inconnue - Musée archéologique de Florence.
Les angles supérieurs du panneau ont été découpés en suivant le contour des cheveux, préfigurant le dessin octogonal formé par les bandelettes qui maintiennent le portrait à la place du visage de la momie. La jeune femme a le teint clair, les traits délicats, la bouche est petite, les grands yeux sont accentués par des sourcils épais et foncés. Les cheveux sont noirs et crépus, coiffés en un chignon caractéristique des Antonins. Elle porte un collier de pierres précieuses et des boucles d'oreilles à pendants ornés de perles. Le grain de beauté sur le front ajoute du charme et de la vraisemblance. Tout indique que ce portrait a été peint par un grand artiste : pose de trois quarts, modelé du cou et du visage, précision du trait, minutie des détails, harmonie des couleurs... Ce tableau fut rapporté en 1829 par l'égyptologue italien Rosellini, il doit son surnom à la ressemblance du portrait avec l'épouse de Rosellini, Zenobia.

Portrait d'homme à la détrempe sur bois. 34 cm x 25 cm - vers 138-161 - Provenance : inconnue - Musée Malibu (Californie) The J. Paul Getty Museum. Deuxième quart du IIIème siècle.
L'homme, vêtu d'une tunique blanche, est représenté dans la position frontale. Il tient dans la main droite un verre (ou un calice?) contenant un liquide rouge (du vin?) et dans la main gauche une guirlande de fleurs. On a retrouvé ces mêmes éléments, à connotation funéraire, dans d'autres tableaux. Ce genre de sujet au visage arrondi et à l'expression souriante est typique d'un artiste dont on reconnaît la "main" dans plusieurs autres oeuvres et qui a été baptisé le "Peintre de Brooklyn" (voir portrait ci-contre).

Portrait de femme - IIème siècle ap JC - Bois peint à l'encaustique - Provenance : Antinoopolis.
Elle est habillée d'un vêtement pourpre et est parée d'un collier et de boucles d'oreilles ornées de perles. La coiffure avec un chignon natté est celle de l'impératrice Sabine, épouse d'Hadrien.

Pour accéder à une description détaillée

Portrait d'homme barbu - Musée historique de Genève (collection Barbier-Müller)
IIème siècle ap JC - Bois de sycomore - H : 33 cm.

Portrait d'un homme jeune  - Musée La Havane (Cuba)
IIème siècle ap JC - Bois peint à l'encaustique -  H : 36.6 cm , l : 15 cm.

LA RELIGION

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LES  PORTRAITS ENIGMATIQUES  DU  FAYOUM (époque romaine)

Sommaire de la partie "Sarcophage" : 11 pages
Page 1 : Fonction - Evolution - Décoration
Page 2 : Le sarcophage de Djedbastétiouefankh (époque ptolémaïque)
Page 3 : Le sarcophage d'Imeneminet (époque ptolémaïque)
Page 4 : Le sarcophage de Chenptah (époque ptolémaïque)
Page 5 : Le sarcophage de Chelidona
(époque romaine)
Page 6 : Le sarcophage de Padiimenipet
(époque romaine)
Page 7 : L'apparition du portrait réaliste sur le sarcophage (époque gréco-romaine) : les linceuls
Page 8 : Les masques plastron à dosseret (époque romaine)
Page 9 : Les masques en plâtre (époque romaine)
Page 10 : Un sarcophage à l'effigie d'un défunt divinisé en Rê-Osiris
(époque romaine)
Page 11 : Les portraits du Fayoum (époque romaine)

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