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CRAPOUILLOT juillet 1933

P 63-65

 POLITIQUE EXTÉRIEURE D’HITLER

 Le point fondamental du programme hitlérien, c’est l’abandon des visées pangermanistes "vers l’Ouest" (annexion du Nord de la France et de la Belgique) et sur le monde colonial ("notre avenir est sur l’eau", disait Guillaume II) et la reprise de la marche vers l’Est (Drang nach Osten), vers l’immense territoire russe. La France n’est plus la terre à conquérir, mais reste simplement la nation qui peut faire obstacle à l’expansion de l’Allemagne vers l’Est. Lorsqu’on parle de la "politique extérieure de l’hitlérisme", il convient d’ailleurs de distinguer les idées de l’agitateur Hitler, exposées en 1923 - il y a dix ans - dans son ouvrage de propagande : Mein Kampf et le programme d’Hitler, chancelier responsable en 1933. En 1923, Hitler déclarait : La France cherche et cherchera toujours le démembrement de sa voisine trop puissante, l’Allemagne. " Si j’étais Français, dit le " Führer ", et si, par conséquent, je tenais autant à la grandeur de la France que je tiens à celle de l’Allemagne, je ne pourrais et ne voudrais agir autrement qu’un Clémenceau pour qui la paix était la continuation de la guerre." Mais la France ne peut être battue que par une coalition : donc, l’Allemagne a besoin d’alliés. Quels peuples choisira-t-elle ? D’abord l’Angleterre. Car l’Angleterre poursuit depuis trois siècles une politique d’équilibre européen et s’efforce continuellement d’empêcher qu'une nation n’établisse son hégémonie sur le continent : après la destruction de la puissance maritime de l’Espagne et des Pays-Bas, elle a combattu la France napoléonienne ; elle devait prendre ombrage de l’essor allemand à l’époque wilhelminienne et s’engager obligatoirement dans la coalition antigermanique de 1914. Mais l’Angleterre s’apercevra qu’elle a perdu la guerre puisque, l’Allemagne s’étant effondrée, c’est la France qui assied son hégémonie sur l’Europe. Pour rester fidèle à sa grande tradition politique, l’Angleterre devra donc logiquement dans l’avenir s’allier à l’Allemagne contre la France... La seconde alliée de l’Allemagne sera l’Italie, rivale de la France en Méditerranée, et que le Traité de Versailles a laissée insatisfaite. Ces alliances serviront à assurer à l’Allemagne ses frontière s de l'Ouest, mois l’Allemagne ne doit pas chercher à s'étendre de ce côté; elle reprendra au contraire la politique d'expansion "vers l’Est", abandonnée depuis six siècles : c'est sur la Russie que l'Allemagne doit conquérir les territoires qui sont indispensables à l’expansion de sa prolifique population. Depuis la consolidation du régime bolchevik, il s’est produit , d’autre part dans certains milieux conservateurs allemands un assez curieusement revirement au sujet de la France. Si une agitation antifrançaise et antipolonaise est traditionnellement continuée à l’usage populaire, c'est vers l’Est, au delà du fameux couloir polonais, vers les terres russes, que sont braqués les regards d’inquiétude et aussi de convoitise des nationalistes allemands. Le parti conservateur - et c’est pourquoi il subventionna Hitler - a une véritable terreur du bolchevisme. Il estime que si les vastes plans bolcheviks réussissent, la Russie d'ici quelques années, sera en mesure d'inonder le marché mondial de produits manufacturés vendus à des prix très inférieurs aux prix de revient des pays capitalistes. C’est une menace de ruine pour l'industrie des pays non soviétisés ; et si le gouvernement russe arrive à réduire la journée de travail à six heures ou même a cinq heures, c’est une menace de révolution prolétarienne. La seule solution contre le dumping " soviétique serait une coalition des pays voisins interdisant à la Russie toute exportation.  A quoi les républiques soviétiques, déjà fortes actuellement de quelque 160 millions d'habitants, pourraient bien répondre par la guerre et l’invasion de l'Europe occidentale. C’ est donc à une guerre "préventive" contre la menace que fait planer sur le monde la Russie communiste et en la surprenant en pleine période d'organisation que l’Allemagne conservatrice entendrait Convier les autres peuples d’Europe, le règlement de la vieille querelle franco-allemande - la troisième manche passant au second plan de l’actualité. DE MÊME QU’EN MARS 1919 LE MARÉCHAL FOCH, GÉNÉRALISSIME DES ARMÉES ALLIÉES, PRÉCONISANT UNE GRANDIOSE INTERVENTION CONTRE LA RUSSIE ROUGE PRÉVOYAIT DANS SES PLANS LA COLLABORATION DES TROUPES ALLEMANDES, DE NOMBREUX NATIONALISTES ALLEMANDS VERRAIENT D’UN FORT BON OEIL UNE VASTE ALLIANCE ANTISOVIETIQUE OU LA FRANCE S’ASSOCIERAIT AVEC L’ALLEMAGNE POUR ANÉANTIR LE COMMUNISME RUSSE, AVEC LE CONCOURS DES RUSSES BLANCS ET L’ARGENT DES PÉTROLIERS ANGLAIS. Le Président Herriot a révélé récemment qu’avant l’arrivée d’Hitler au pouvoir, Von Papen lui avait nettement proposé cette alliance franco-allemande sur la base d’une campagne contre les soviets. Car, contrairement à l'opinion courante, l'idée d'un rapprochement franco-allemand ne fut pas seulement l'apanage des partis de gauches des deux pays, mais fut aussi l'objet de nombreuses conversations entre le représentant de la haute métallurgie française (ce n'est pas pour rien que Monsieur François Poncet, l'homme du comité des forges, est ambassadeur à Berlin) et les magnats de l'industrie lourde allemande qui voyaient dans cette alliance la possibilité d'y extirper d'Europe le danger bolcheviste, et pour allécher l'industrie lourde française, proposaient même de faire participer les firmes françaises au réarmement de l'Allemagne. Malgré la rancune des traités de 1919, certains milieux ultra-conservateurs allemands dissimulent mal une secrète admiration pour la France considérée comme "le pays le plus réactionnaire d’Europe" et il n’est pas rare d’entendre dire à Berlin qu’ "Allemands et Français alliés seraient les maîtres du monde". Or, le point où les idées des conservateurs allemands, représentant la haute industrie la noblesse et la caste militaire, sont absolument d’accord avec les théoriciens et les chefs du national-socialisme, c’est la nécessité d’abattre le marxisme en Europe donc de vaincre la Russie. Cette nécessité d’une guerre contre la Russie cadre d’ailleurs exactement avec le grand principe hitlérien du "retour à la terre " Alors qu’en Russie, pays agricole, le gouvernement soviétique, pour réaliser le dogme marxiste, arrache le paysan à sa terre et fait de lui un prolétaire, Hitler, à l’inverse, veut transformer ses chômeurs ouvriers en paysans en leur distribuant des terres. D’où une politique extérieure d’expansion — au besoin par la conquête — vers un pays qui possède d’immenses terres non cultivées, et qui pourraient être colonisées par l’Allemagne. Si Hitler persévère dans cette politique, la Pologne devra sans nul doute prendre une très grave détermination : soit qu’elle se rapproche de la Russie, qui prendrait l’engagement de défendre le Couloir polonais ; soit, ce qui paraît beaucoup plus probable, qu’elle s’allie à l’Allemagne, qui lui promettrait pour l’avenir, en échange du Couloir polonais, le port de Memel et une zone d’influence sur l’Ukraine, proclamée " indépendante " et détachée des républiques soviétiques.

 

MEDAILLES GRAVEES A LA GLOIRE D'HITLER

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