CRAPOUILLOT juillet 1933 |
P 73-75 |
HITLER, CHAMPION DE LA LÉGALITÉ? |
FETE D'ETUDIANTS
De Boulanger à Hitler Lorsquon compare la violence systématique dHitler, 1agitateur de 1923, à la pondération dHitler chancelier de 1933, chacun est en droit de se demander : " Est-ce aujourdhui quil est sincère ? " En France, la foule croit ou craint que non. Quun politicien démagogue ne réalise point, parvenu au pouvoir, certaines de ses promesses ou de ses menaces ne devrait pourtant pas sembler extraordinaire dans un pays où, de deux fameux apologistes de la " Crosse en lair ", lun fut dix-sept fois ministre ou président du Conseil, et lautre devint président de la République... Lhitlérisme est la forme spécifiquement germanique du redressement inévitable dun grand peuple après de douloureuses épreuves : En France, après la débâcle de 1871, - infime en comparaison de lécroulement allemand de 1918, - nous avons eu aussi un " général Revanche " nos grands-pères ont hurlé : " A Berlin ! " sur les boulevards, et fredonné : " Nous reprendrons lAlsace-Lorraine "au retour dés revues du 14 juillet ; ils ont gardé lil fixé sur lEst; ils lont même gardé quarante-trois ans; et c est leurs petits-fils quils ont chargés daller à Berlin... Souvenez-vous du calme des belles soirées de juillet 1914 ; ce nest pas quand les foules enivrées braillent dans les rues des refrains belliqueux que lon peut redouter la guerre pour le lendemain ; elle éclate au contraire dans un ciel serein, au moment où les peuplés confiants sy attendent le moins. Hitler contre la guerre ? Lorsquil sest écrié dans son discours au Reichstag : " Aucune guerre en Europe ne pourrait créer quelque chose de meilleur pour remplacer ce qui existe. Même un succès décisif ne ferait que poser le germe de nouveaux conflits et de nouvelles guerres. SI UNE TELLE FOLIE SE PRODUISAIT UN JOUR, CE SERAIT LA RUINE DE LORDRE SOCIAL, UN CHAOS SANS FIN, LE BOLCHEVISME", Hitler navait-il pas médité la sombre prophétie de lécrivain allemand Ludwig Baüer, dans son terrible ouvrage : "La Guerre est pour demain" : "LUnion Sacrée "made in Germany" qui ne connaissait plus de partis, ne saurait se refaire : Juillet 1914 ne se répète pas. LEtat ne se lancera plus dans une lutte entre la vie et la mort, mais seulement dans une lutte entre une mort et une autre mort : Car il nexistera sous la forme dun tout homogène et ne tardera pas à se désagréger en groupes hostiles les uns aux autres. Il se peut que ce processus ne se manifeste pas dés le début et que lon réussisse a gagner du temps par la terreur ; néanmoins, des fronts ennemis ne tarderont pas à creuser leurs tranchées à lintérieur même du pays, des fronts qui, de la défaite de leur patrie, espèrent la victoire de leur classe, le triomphe de leur idéologie. Il y a lieu de s'attendre à une décomposition cancéreuse de toute, les cellules de lEtat; la guerre se diviserait en guerres multiples, toute autorité se briserait, tous se précipiteraient contre tous, et, à la fin il pourrait arriver que personne neût plus assez de force pour faire la paix et pour limposer au monde. Que la guerre soit déchaînée par des fascistes, des bolchevistes ou des patriotes un danger beaucoup plus grand encore que lEtat assassin serait la dissolution. Inévitable de cet Etat en bandes et en groupes, où chacun coin commanderait dans la mesure où il pourrait piller et tuer, " Ainsi donc, par ces mots : " La guerre est pour demain. ", il ne faut pas se représenter une boucherie bien convenable, bien réglée, bien délimitée et pour ainsi dire bien propre, comme lont été les guerres antérieures ; |
lidentité du terme
pour désigner des choses dissemblables induit en erreur. Toutes les distinctions faites
entre le front et larrière, entre ce qui est permis et ce qui est défendu, entre
les soldats et les civils, entre les instruments de guerre et le travail pacifique
sévanouissent. De même que le gaz toxique ne connaît point duniformes, de
même il est dans la nature de la guerre de demain de déchirer les unités nationales. Au
début seulement, lennemi sera celui qui répandra, du haut du ciel, des bombes
incendiaires et des nappes de gaz ; bientôt, l'ennemi deviendra celui qui
continuera cette guerre, quel quil soit, et quand, par leffet des vapeurs
toxiques, les centres nerveux dun pays seront paralysés ou morts, ses divers
éléments, dans leurs convulsions, se précipiteront les uns sur les autres pour se
battre. Ainsi donc, on peut prévoir un état de choses que lon appellerait
volontiers la "débâcle de notre civilisation " ou la fin du monde." Hitler champion de la légalité ? Dans la vie des hommes et des peuples, il arrive souvent que les événements se déroulent dans lordre exactement contraire aux prévisions des augures et aux calculs du bon sens. Peut-être les mémorialistes de lAllemagne contemporaine nont-ils pas assez insisté sur ce fait curieux que las des agitateurs refusa toujours de faire un coup dÉtat pour semparer du pouvoir et quil attendit, pour devenir le maître ... ce qui prouve sa profonde connaissance de la psychologie allemande, dêtre appelé par le Président du Reich. Si Hitler, suivant lexemple de Mussolini, entend dicter ses volontés au Parlement, il nest pas moins vrai quil ne devint chancelier quaprès s être assuré une majorité parlementaire. Hitler avait juré quune fois au pouvoir il ferait rouler par dizaine de milliers les têtes de ses ennemis dans le " son " ; o r, la révolution allemande, si elle savéra brutale et inexorable, fut jusquici peut-être une des moins sanglantes de lhistoire (si on la compare à la Révolution française ou à la Révolution russe , par exemple). Hitler avait aussi juré quil jetterai à la face des anciens alliés les morceaux déchirés du "diktat " de Versailles. Quel est son premier acte important de politique extérieure? Il use de sort autorité personnelle pour faire accepter à la Wilhelmstrasse la nouvelle rédaction française du "Pacte à Quatre" Comme son chef, le peuple allemand reste pour le peuple français une énigme bien difficile à déchiffrer : A Berlin, il y a un mois, la pièce du jour était lapothéose de Schlageter, le dynamiteur de trains; aujourdhui, les mêmes spectateurs applaudissent à tout rompre une pièce à tendances nettement pacifistes : " Au ciel de lEurope ", dont le personnage sympathique est un jeune Français, et où le rapprochement franco-allemand seffectue par la camaraderie sportive de la jeunesse des deux peuples! Si le régime hitlérien se consolide, verrons-nous lancien " guerrier déchaîné " tenter un jour dobtenir, par les voies légales auxquelles il paraît attacher tant de prix, et avec lacquiescement des intéressés, des modifications à certaines clauses irritantes des traités de paix, suivant dailleurs les dispositions prévues clans le Pacte de la Société des Nations ? Certaines nations repousseront-elles alors, dans une Europe apaisée, les accommodements quelles refusaient d'entériner " sous la menace des baïonnettes " ? Verrons nous un Hitler épanoui suivre un jour les traces de son allié, le Duce, dont les gens informés racontent que lambition actuelle serait - si étrange que cela puisse paraître de reprendre le bâton du pèlerin échappé de la main de Briand et dorganiser la Paix de lEurope ? CHI LO SA... Jean Galtier-Boissière. |
LA GRANDE FETE DU 1er MAI A TEMPELHOF
APOTHEOSE D'HITLER PAR LE PEINTRE ISRAELITE A. FISCHER