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SAPHO
SAPHO (ou SAPPHO)
"Pure Sappho aux tresses de violettes, au
sourire de miel..."
(attribué au poète Alcée, amoureux, dit-on, de la
poétesse)
Isabelle
Didierjean, professeur
agrégé
de Lettres classiques
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Sapho est une poétesse mais aussi une éducatrice qui vécut de - 650 environs
à - 580 environs. Elle est née à Mytilène, dans l'île de Lesbos, au sein
d'une famille noble. Elle a dû s'exiler en Sicile après avoir soutenu le
parti aristocratique contre le tyran Pittacos. On sait peu de choses sur sa
vie. Les renseignements donnés par
les poètes comiques athéniens sont sujets à caution. A-t-elle été aimée d'Alcée,
le poète qui était son contemporain. S'est-elle jetée dans la mer du haut d'un
rocher par amour pour Phaon comme la tradition et la littérature (Léopardi)
l'ont raconté? Elle a peut-être été mariée et a eu une fille :
"J'ai une belle enfant, qui
ressemble
aux fleurs d'or : ma Cléis chérie, pour qui
je ne prendrais pas la Lydie tout entière.". |
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Portrait dit de Sapho, Pompéi, Ier
siècle après J.C. |
A partir du
contenu de ses poèmes, adressés à des jeunes filles, Anacréon et d'autres poètes
ont prêté à Sapho une homosexualité qui depuis est restée attachée à son nom
(d'où le terme d'"amours saphiques" données aux amours homosexuelles féminines
ou l'adjectif "lesbien" tiré du nom de son île natale, Lesbos) mais cela reste
encore un sujet de controverse. Pour certains le contenu de ses poèmes est
suffisamment explicite pour justifier cette thèse : ce sont des poèmes d'amour,
d'une passion brûlante et sensuelle, adressés à des jeunes filles. Elle s'y
nomme elle-même, ce qui exclut l'hypothèse d'œuvres de commande. Pour les
auteurs du Dictionnaire de l'Antiquité (Oxford), si c'est à Lesbos
que l'on trouve l'expression de l'homosexualité féminine la plus marquée, c'est
parce que les femmes y étaient plus libres qu'en Grèce continentale, mais que,
cependant, "les preuves de relations physiques sont douteuses" et que "ses
relations avec les jeunes filles étaient comme celles de Socrate avec de beaux
jeunes gens (c'est-à-dire ardentes mais chastes)".
Sa
poésie marque l'apogée du lyrisme grec des côtes d'Asie et des îles proches.
Alcée, dont on a dit qu'il avait peut-être été amoureux d'elle, est
également un représentant de ce courant poétique. Ces poèmes chantés,
accompagnés d'un instrument à cordes (comme l'indique l'étymologie de
l'adjectif "lyrique"), et de danses forment un moment important des
cérémonies privées ou publiques. Sapho utilise des strophes brèves appelées
"saphiques" et des vers très courts. Catulle puis Horace, à Rome, vont
reprendre ou modifier cette métrique. Elle a écrit en dialecte éolien neuf
livres de poèmes lyriques : élégies, épithalames (chants nuptiaux),
épigrammes etc. Il ne nous reste de son oeuvre que des fragments.
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La gloire de
Sapho a été considérable. Ainsi Platon la considérait comme la dixième Muse:
"On
dit qu'il y a
neuf Muses, voilà qui est bien sommaire ! Considérez aussi Sappho
de Lesbos, la dixième".
Le compilateur grec Stobée
a raconté que le sévère Solon lui-même avait décidé d'apprendre ses vers par
cœur tant il avait été ému par leur beauté. Mais cette poésie considérée comme
païenne au Moyen Age a été censurée et est tombée dans l'oubli, avant d'être
redécouverte au XVI° siècle. Mais les dommages étaient irréparables.
Poèmes de Sapho:
A UNE AIMEE
Il goûte le bonheur que
connaissent les dieux
Celui qui peut auprès de toi
Se tenir et te regarder,
Celui qui peut goûter la douceur
de ta voix,
Celui que peut toucher la magie
de ton rire,
Mais moi, ce rire, je le sais,
Il fait fondre mon cœur en moi.
Ah ! moi, sais-tu, si je te
vois,
Fût-ce une seconde aussi brève,
Tout à coup alors sur mes
lèvres,
Expire sans force ma joie.
Ma langue est comme brisée,
Et soudain, au cœur de ma chair,
Un feu invisible a glissé.
Mes yeux ne voient plus rien de
clair,
A mon oreille un bruit a
bourdonné.
Je suis de sueur inondée,
Tout mon corps se met à
trembler,
Je deviens plus verte que
l’herbe,
Et presque rien ne manque encore
Pour me sentir
comme une morte.
(traduction de R. Brasillach, dans l'Anthologie de la poésie grecque)
Nous tenant par la main dans la nuit
parfumée,
Nous allions à la source ou rôdions
par les landes.
J'ai tressé pour ton cou
d'entêtantes guirlandes;
La verveine, la rose et la fraîche
hyacinthe
Nouaient sur ton beau sein leur
odorante étreinte.
Les baumes précieux oignaient ton
corps charmant
Et jeune. Près de moi reposant
tendrement,
Tu recevais des mains expertes des
servantes
Les mille objets que l'art et la
mollesse inventent
Pour parer les filles d'Ionie.
(cité dans La Grèce archaïque d'Homère à Eschyle, de Claude Mossé)
Isabelle
Didierjean, professeur
agrégé
de lettres classiques au collège public Jeanne
d'Arc - Orléans.
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